Matisse, Henri

De la bibliothèque d'un éminent bibliophile

Matisse, Henri

[Cantique des créatures]. Manuscrit autographe. 

[Vers 1950 ?]

2 pages in-4 (265 x 208 mm, à vue). Numérotées 1-2. Encre noire et rouge. Encadrées, sous verre.

MATISSE, ENLUMINEUR DE SAINT FRANÇOIS D'ASSISE.

Manuscrit calligraphié à l'intention de son ami André Rouveyre, orné de lettrines à l’encre rouge et de motifs en guirlande, en rouge et noir, dans la marge de gauche et la marge inférieure.

"Loué, sois-tu Monseigneur,

pour sœur Onde,

Laquelle est bien utile

et humble et précieuse et chaste.

Loué, sois-tu Monseigneur,

pour frère Feu,

Par qui tu m’embrasses la nuit,

Et il est beau et joyeux & robuste et puissant

Loué, sois-tu Monseigneur,

pour notre maternelle sœur,

La Terre, laquelle nous soutient & nous mène,

Et produit les diversités des fruits avec

les fleurs coloriées et l’herbe.

Loué, sois-tu Monseigneur, avec toute ta création.

Et spécialement Messire

le frère Soleil,

Lequel donne le jour,

et tu nous illumines par lui.

Et il est beau et il rayonne

à grande splendeur.

De toi, Infiniment-Haut,

il est le signe.

Loué, sois-tu Monseigneur,

pour sœur Lune et les Etoiles.

Dans le ciel, tu les formas claires et précieuses

et belles."

Il s'agit d'un extrait du Cantique des Créatures, texte composé originellement en dialecte ombrien, vers 1224, par saint François d’Assise chantant les louanges du Dieu créateur. Ces vers ont notamment inspiré le maître-verrier Paul Bony pour des vitraux de l’église Saint-François-d’Assise (rue de la Mouzaïa à Paris), Bony qui réalisa également les vitraux de la chapelle du Rosaire de Vence, inaugurée en 1951, entièrement dessinée et décorée par Matisse.

Matisse et Rouveyre se connaissent depuis plus de 40 ans lorsque la guerre les rapproche, tous deux s'installant dans le midi de la France et se retrouvant à Vence. "Nos parcours à l'un et à l'autre, et jusque-là si divers, allaient se trouver au plus étroit fraternel. Nous allions nous épauler, en 1941, entourés, cernés par la dure oppression de la guerre [...] Incessamment nos rencontres, nos entretiens se complètent, se poursuivent dans l'échange de nos lettres quasi journalières et alternantes (A. Rouveyre, "Matisse évoqué" in La Revue des Arts, juin 1956).

Dans ses lettres, où il est souvent question de projets menés en collaboration, Matisse confie à Rouveyre nombre de réflexions et de détails sur sa démarche créative, se montrant obsédé notamment par des motifs végétaux, dessinés et redessinés inlassablement.