

Les droits de l'homme de 1793 en 35 articles, le nouveau préambule de la Constitution.
Exceptionnelle affiche de format monumental, inconnue, vraisemblablement unique.
Rarissime papier peint rehaussé à la gouache, elle est aussi la seule production connue de la Maison Arthur et Robert portant leur signature.
Après l’abolition de la monarchie le 21 septembre 1792 et l’exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793, la Convention considère la Déclaration des Droits de l'Homme de 1789 et la Constitution de 1791comme dépassées. Dès septembre 1792, elle a lancé un nouveau projet réunissant à la première Constitution "républicaine", une Déclaration des droits de l'homme qui en formerait le préambule.
Cette nouvelle Déclaration, débattue sous les Girondins et adoptée après la victoire des Montagnards, est emblématique de l’évolution des idéaux révolutionnaires : recentrée sur la société et l’égalité, elle entend dépasser les droits individuels conquis en 1789.
La Déclaration des droits est adoptée le 24 juin 1793. Elle contient le fameux article XXXV légalisant le droit à l'insurrection. Avec le renversement de Robespierre (juillet 1794) et la fin de la Convention montagnarde, cette Constitution de la Terreur restera lettre morte.
Les affiches de la Constitution et des Droits de l'homme de grand format sont rarissimes. Destinées à être déployées dans les lieux officiels où se fabriquait la République, elles ont pratiquement toutes disparu. Les affiches accrochées à la Convention, au Tribunal révolutionnaire de Paris, et dans divers hôtels de ville, visibles dans les gravures de l'époque, présentent des décors différents de celle-ci.
D'un style purement allégorique, elle présente un décor inhabituel, moins chargé en éléments décoratifs que les Déclarations imprimées à usage public à l'époque : plus classique, à la fois plus artistique et plus austère, produit stylistique de la Terreur, elle se limite aux symboles révolutionnaires essentiels : cocarde, faisceau de licteur, allégorie féminine de la République, et frise de putti à l'Antique.
Seules 2 affiches du texte de la Déclaration de 1793 de grand format (supérieur à 2 mètres) ont été conservées :
- au Musée Carnavalet, la Déclaration imprimée à la Manufacture de papiers peints boulevard du temple, N°.27 à Paris par Daguet qui, avec la Constitution, se trouvait placée derrière le fauteuil du président de la Convention (2,58 x 1,49 m).
- à l'Hôtel de Ville de Dieulefit, dans la Drôme (2,53 x 1,37 m, mensurations connues avec le cadre).
On trouve une Déclaration des Droits de 1789 de 2,26 x 1,30 m dans les collections du Musée Unterlinden de Colmar.
Notre affiche est inconnue des collections publiques comme des collections privées quasi-exhaustives établies au XIXe siècle telles que celle de Michel Hennin (15 000 pièces) et de Carl De Vinck (28 000 pièces). Elle n'est répertoriée dans aucune bibliographie de la Révolution, ni dans les bases du Ministère de la Culture, ni parmi les milliers de documents numérisés dans la base Archives numériques de la Révolution française, compilation exhaustive des collections révolutionnaires de la Bibliothèque nationale réalisée par l’université de Stanford.
Elle est signée Robert et Arthur à la manufacture de papiers peints, rue des Piques. A Paris, l’une des deux plus importantes fabriques de papiers peints de la fin du XVIIIe siècle, dont le seul véritable concurrent était la célèbre manufacture Réveillon. Fondée dans les années 1770 sous le nom d'Arthur et Grenard, par l’association de l'anglais Jean Arthur et de René Grenard, la manufacture est installée dans un grand bâtiment au coin de la rue Louis-Le-Grand et du boulevard des Italiens. En 1788, "elle obtient comme celle de Réveillon le titre envié de Manufacture royale, puis la société est vendue à François Robert qui s’associe à Arthur fils, prénommé Jean-Jacques. [...] la fabrique Arthur & Grenard devient Arthur & Robert" (Xavier Petitcol, "Un gilet Directoire imprimé en taille-douce", in Textes et textiles du Moyen-Âge à nos jours, 2008, p. 100).
Elle est le seul papier peint produit par cette manufacture portant la signature d'Arthur et Robert.
Ami intime de Robespierre, Jean-Jacques Arthur s'engage avec ardeur dans la Révolution, tout en conservant son titre de "Fournisseur de la Couronne". Alors que Jean-Baptiste Réveillon émigre en Angleterre, Arthur devient membre actif du club des Jacobins, dans la section des Piques, la fameuse section de Robespierre. Il pourvoit encore les Tuileries en papiers peints, ainsi même que le Temple où est détenue la famille royale dès la fin 1792. On peut imaginer que les liens politiques et d'amitié qu'entretiennent Arthur et Robespierre sont à l'origine de la commande de cette affiche. A la chute de Robespierre le 9 Thermidor an II, Arthur est condamné, et décapité deux jours plus tard.
Respectant en cela le dernier article de l’Acte constitutionnel de 1793 ("Article 124. - La déclaration des Droits et l'acte constitutionnel sont gravés sur des tables au sein du Corps législatif et dans les places publiques."), les affiches étaient destinées à être placées dans les bâtiments officiels et les Sociétés patriotiques où se réunissaient les citoyens.
Cependant, si les Déclarations connurent une multitude de tirages, elles étaient dans leur immense majorité des impressions purement typographiques de format moyen (60 cm de hauteur), rarement illustrées. Un nombre infime d'affiches monumentales fut produit, reconnaissables dans quelques vues gravées de l'époque : exigeant plusieurs tirages de couleurs, elles nécessitaient d'être assemblées, rehaussées de peinture, et marouflées, et n'étaient à la portée que de quelques très rares artisans.
De la bibliothèque Jean Blondelet.