拍品 18
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COCTEAU. CONFÉRENCE SUR ERIK SATIE. MANUSCRIT AUTOGRAPHE SIGNÉ [1921], 14 P. IN-4. RELIURE DE MERCHER

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描述

  • Cocteau, Jean
  • Conférence sur Erik Satie. Manuscrit autographe signé, [1921].
14 pages dans un cahier grand in-4 (303 x 230 mm), avec titre autographe sur le premier plat. Relié en un volume grand in-4 bradel demi-maroquin noir, plats de plexiglas, titre au palladium, étui (Mercher). Précieux témoignage de l’admiration que vouait Cocteau à Erik Satie. Ainsi que le précise l’écrivain à la dernière page, Cette conférence qui devait précéder le festival Erik Satie le 12 avril 1921 à Bruxelles, ne put être faite, l’auteur étant malade (encore assez méconnu à cette époque, Satie mourra en 1925). En réalité, Cocteau avait déjà prononcé à Bruxelles, le 19 décembre 1919, une conférence sur Satie, qui fut publiée dans Action (mars 1920), suivie d’une deuxième, lue à Paris le 6 juin 1920, dont la Revue musicale publiera des extraits (mars 1924). Ce cahier de travail nous livre le texte révisé de cette conférence de Bruxelles tel qu’il l’a retravaillé ensuite pour Leigh Hunt, directeur de la revue musicale anglaise Fanfare. Certains passages sont biffés, d’autres (dont trois morceaux imprimés sont des extraits d’Action, découpés et collés) comportent des ratures et corrections ; une fin nouvelle est ajoutée à la main. Comme l’écrivain l’a précisé, puis biffé, sur la couverture, il s’agit ici d’une 2e version de la conférence, qui sera publiée — traduite en anglais — dans Fanfare en 1921 (15 octobre 1921, n° 2). En préambule, Cocteau s’attache à définir l’esprit nouveau, qui déroute tant les critiques : on pourrait dire que l’esprit nouveau, à toutes les époques, est la plus haute forme de l’Esprit de contradiction. Il en vient à son sujet : Je voulais vous parler d’abord d’un jeune homme de cinquante-six ans. Ce jeune homme est Erik Satie. Toute cette partie est biffée par Cocteau, qui commence alors son nouveau texte : Imaginez un charmant prologue. Un chapitre de Stevenson. Nous sommes à Londres. Une vieille dame anglaise, Miss Hanton, a une fille et un fils. Cette fille épouse à Honfleur un M. Satie, puis elle met au monde un fils. Ce fils est Erik Satie. Erik Leslie Satie... Donc Satie est né à Honfleur... Car il existe un esprit de Honfleur célèbre par Alphonse Allais et Satie... Réserves sur Allais : Ce qui nous reste après sa mort est peu de chose. Une porte de bar, entrouverte sur la mer... Avec Satie, reprend Cocteau, on se trouve en face d’une musique de France... cette musique dessine au lieu de peindre et donne plus qu’elle ne propose. Deux qualités françaises.... Satie a protégé sa musique comme du bon vin. Il n’a jamais remué la bouteille. À propos de sa jeunesse à Montmartre et de l’influence de Wagner : Satie fut le seul à sortir sans dommages de cette brume qui égare même Chabrier... Anecdotes : “Wagner eût-il écrit cet accord ?”, demandait Péladan sévèrement à Satie qui lui limait une sonnerie de trompes pour la Rose-Croix. “Certes”, répondait-il, sachant bien que non et riant derrière son binocle... Satie, faisant la connaissance de Debussy, lui déclara : “Croyez-moi... assez de Wagner. C’est beau, mais ce n’est pas de chez nous.”  Cocteau avertit le public : Je vais citer une phrase de Satie qui m’a été dite par Debussy et qui décida de l’esthétique de Pelléas. “ Il faudrait — dit-il — que l’orchestre ne grimace pas quand un personnage entre en scène. Regardez. Est-ce que les arbres du décor grimacent ? Il faudrait faire un décor musical”. Evocation de Satie en 1909 : De temps à autre, il apporte à Ricardo Viñes une petit morceau de piano. En manière d’excuse, il l’habille d’un titre farce, d’un titre ridicule... Même, un jour, Satie, ayant composé la musique la plus exquise, l’intitule : AIRS A FAIRE FUIR... Maintenant, Satie n’a plus besoin de farces : il a fait Parade, Socrate, Nocturnes, Paul et Virginie, sur un livret de Raymond Radiguet et de moi. Suit un long passage (biffé) sur Le Sacre du Printemps et Picasso, transcrit de son livre Le Coq et l’Arlequin. Conclusion : Satie apporte une simplicité neuve, enrichie de tous les raffinements qui précèdent […] Un “maître” est presque toujours un papier à mouches. Satie chasse les mouches. Les jeunes musiciens l’appellent “Le bon maître”. Au dos du second plat, figure une lettre autographe à Leigh Henry, 21 Septembre 1921, pour accompagner l’envoi de sa conférence : Voici le texte. J’ai la phobie des fautes. Je compte sur vous pour m’envoyer des épreuves avant de faire paraître. Merci d’avance. Jean Cocteau. La lettre est accompagnée d’un poème autographe. Évoquant une poésie mal ponctuée, il en transcrit une autre, inédite, qui existe chantée avec petit orchestre par Darius Milhaud : Miss Aérogyne, femme volante : Pigeon vole ! Aérogyne. / Elle ment avec son corps / Mieux que l’esprit n’imagine / Les mensonges du décor. (8 vers en tout). Cette poésie, d’abord parue dans Fanfare (n° 3), sera reprise dans Vocabulaire (Œuvre poétique complète, Pléiade, p. 303). Brillante évocation de l’auteur de la musique de Parade, composée par Satie sur un argument de Cocteau et créée en 1917. Jean Cocteau, Écrits sur la musique, éd. D. Gullentops et M. Haine, Paris, Vrin, 2016, p. 170-176 et 265-271 ; ce manuscrit publié dans Fanfare y est mentionné, mais les éditeurs n’avaient pas pu le localiser.