

ZAO WOU-KI / CHU TEH-CHUN - DEUX OEUVRES EXCEPTIONNELLES
François Cheng, Vide et Plein : le langage pictural chinois
C’est en 1935 à Hangzhou, ancienne capitale des Song, que Chu Teh-Chun découvre les grands maîtres de la peinture occidentale. Son professeur, Lin Fengmian, est un fervent admirateur de Cézanne et Matisse. La même année, le conflit sino-japonais oblige les élèves de l’école des beaux-arts de Hangzhou à quitter la ville pour Chongqing, à quatre mille kilomètres à l’Ouest. Il faudra près de deux ans à Chu Teh-Chun pour les parcourir. Durant ce voyage, le jeune artiste s’essaye à la représentation des paysages qu’il traverse dans la pure tradition chinoise. Il dessine des centaines d’œuvres, à la manière des grands paysagistes des dynasties Tang et Song. Dans les mois qui suivront, Chu Teh-Chun va comprendre comment, grâce à ce genre particulier qui prend pourtant une forme très dissemblable dans la tradition occidentale et chinoise, il va pouvoir créer un lien et rapprocher ces deux cultures esthétiques.
Près d’un demi-siècle plus tard, Chu Teh-Chun, installé en France, retrouve Lin Fengmian qui expose au musée Cernuschi à l’occasion d’une rétrospective qui lui est dédiée. A l’époque, les expositions rendant hommage au travail de Chu Teh-Chun se succèdent -à Luxembourg, Sorrente, Saint-Etienne…- et la première monographie entièrement consacrée à son œuvre est déjà parue. C’est dans ce contexte que l’artiste exécute 5 mai 1978, toile majestueuse encore jamais présentée en ventes aux enchères à ce jour. Le spectacle y est extraordinaire. La couleur semble émerger d’un abime, en une multiplication de feux, de tâches de lumière. Au cœur de la matière, c’est la vie qui frémit. Tout un monde intérieur se dévoile, évoquant « la jouissance d’un moment musical ou la majesté d’une architecture transfigurée (…), la plénitude d’une émotion ou encore la conscience du simple rythme des heures et des saisons » comme l’a parfaitement résumé Jean Cardot dans son discours prononcé lors de la séance publique de réception de Chu Teh-Chun à l’Académie des beaux-arts française en 1999.