Art d'Afrique, d'Océanie, d'Indonésie et des Amériques
Art d'Afrique, d'Océanie, d'Indonésie et des Amériques
Provenant d'une collection privée, Paris
Lot Closed
December 16, 01:19 PM GMT
Estimate
15,000 - 25,000 EUR
Lot Details
Description
Statue kut, Jaraï, Région des Hauts Plateaux du Centre, Vietnam
haut. haut. 111 cm ; 44 in
Jaraï kut Figure, Central Highlands Region, Vietnam
Galerie Punchinello, Paris
Collection privée, Paris
Les peuples des hauts plateaux Vietnamiens, et plus particulièrement les Jaraï et les bahnar, ornent leurs tombeaux de sculptures en bois fichées dans le sol. Celles-ci sont spécialement sculptées pour la cérémonie « d’abandon de la tombe », au cours de laquelle la famille en deuil adresse ses adieux au défunt avant de le laisser partir pour le monde des esprits et poursuivre le cycle des réincarnations.
Cette cérémonie clos une importante période de deuil pouvant s’étaler sur plusieurs années pendant laquelle la famille du défunt se doit d’observer un certain nombre de règles strictes (veuvage, code vestimentaire et capillaire etc.) avant d’abandonner la tombe et de ne plus y revenir.
Dans ce contexte funéraire les Jaraï ont livré une importante statuaire. En effet, chaque tombes (pouvant regrouper plusieurs dizaines de corps) étaient ornées sur tout leur pourtour de plusieurs dizaines de ces statues. Ces statues adoptaient des poses canoniques bien définies. Si la femme est représentée au travail, dans des positions dynamique, l’homme est lui représenté dans des positions passives, habillé, assis ou debout, les genoux repliés contre le torse, les mains posées sur le visage. Ici, la typologie de la statuaire renvoie à ce type masculin : les jambes repliées contre le buste, les coudes soutenant les genoux les avant-bras remontant sur le visage. Bien que l’iconographie Jaraï n’ai pas été formellement définie, plusieurs hypothèses ont été avancées pour tenter d’en déchiffrer la signification. Selon un mythe, un ancien roi Jaraï fût enterré avec ses serviteurs. Ne restant plus personne pour pleurer, des effigies de ses serviteurs ont été installées afin de représenter les pleurs, et figurer les serviteurs officiant dans l’autre monde. Selon une autre explication, ces effigies ont permis d’éviter les sacrifices humains en les substituant à des sculptures. Pour les ethnologues vietnamiens, la position des genoux fléchis et des bras repliés sur le torse correspond à la position fœtale évoquant la future réincarnation du défunt en un enfant. Enfin, selon les Jaraï eux même, ces sculptures funéraires ont pour but de ne pas laisser l’esprit du défunt (yang atâo) seul après la cérémonie d’abandon.
Découpée dans le bois avec une hache à balancier, la forme de la statue s’inscrit dans la forme du tronc duquel la sculpture a été dégrossie. Les Jaraï ne font que peu de cas de la mimésis. Ce qui importe pour eux n’est pas l’esthétisme de l’objet mais l’accomplissement de sa fonction rituelle et sa valeur de signifiant. Ainsi, les détails du visage ou celui des doigts sont à peine esquissés.
Après la cérémonie de l’abandon, la sculpture est laissée à elle-même et est exposée aux éléments. Certain sculpteur s’attachait à sélectionner des bois plus résistants, plus durs, pour parer aux affres du temps sur la statue. C’est cependant précisément cet aspect raviné, marqué par les années d’exposition en extérieur à la pluie, au soleil et au vent qui saisit aujourd’hui le spectateur et séduit le collectionneur en recherche d’une vanité extra européenne.