Lot 123
  • 123

MELLE DE LESPINASSE. LETTRE AUTOGRAPHE SIGNÉE À TURGOT [1762]. 4 PAGES IN-12. LETTRE POLITIQUE ET LITTÉRAIRE.

Estimate
2,500 - 3,500 EUR
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Description

  • Lespinasse, Julie de
  • Lettre autographe [à Turgot]. Lundi au soir [fin 1762].
4 pages in-12 (155 x 97 mm), sur un bifeuillet. Belle lettre à la fois politique et littéraire, évoquant le Contrat Social de Rousseau ainsi que le traité de 1761 entre les Bourbons. D’Alembert, Frédéric II de Prusse, Mme du Deffand et Voltaire notamment, y sont cités. Elle ne se plaint pas du laconisme de son correspondant et le remercie de tout cœur puisqu’il respecte leurs conventions : il ne l’oublie et elle ne l’importunera pas. "Je vous envoye une lettre de Rousseau […] On publie que c’est une retractation et on l’en blame. Je trouve que cen n’est bien loin et je l’approuve d’avoir écrit cette lettre, puisqu’elle étoit necessaire pour sa tranquilité, et de dédaigner l’aprobation et le blame des sots ou de ses envieux. Vous avés surement lu son contract social, il serait imprudent de l’envoyer quoiqu’on m’est assuré l’avoir vu vendre l’autre jour dans l’antichambre de M. le Dauphin". Elle s’inquiète, comme Turgot, de la fragilité de la paix : "On dit qu’elle va bien mal, ce pacte de famille nous embarasse autant que si c’étoit un pacte avec le diable, cependant une bien grande, bien belle et bien habile chose d’avoir pu réussir où Louis 14 et ses ministres avoient échoué", puis elle se fait l’écho du mécontentement soulevé par le voyage de Fontainebleau [relatif au traité secret par lequel la France céda la Louisiane en novembre 1762 ?] avant d’aborder des questions littéraires avec l’opinion de Mme Du Deffand sur Antoine-Léonard Thomas : "elle a confondu son nom avec l’ode et l’éloquence et tout cela lui fait également horeur". Elle envoie à Turgot une épitre du roi de Prusse s’il a la curiosité de voir comment Frédéric II peut trouver le temps de rimer et de rire. "M. d’Alembert est ravi que vous ayés approuvé son petit écrit, il se fait un plaisir que vous jugiés les vers du roi de Prusse […] il a reçu une invitation pressante de la czarine pour entrer dans les soins de l’éducation du grand duc de Russie, je n’ai pas besoin de vous dire qu’elle a été sa réponse. Voltaire va avoir bien du plaisir. M. de Richelieu va le voir." Effectivement d’Alembert déclina l’invitation de l’impératrice Catherine II, en justifiant spirituellement sa réponse dans une lettre à Voltaire, le 25 septembre 1762 : "savez-vous qu’on m’a proposé, à moi qui n’ai pas l’honneur d’être jésuite, l’éducation du grand-duc de Russie ? Mais je suis trop sujet aux hémorroïdes ; elles sont trop dangereuses en ce pays-là ; et je veux avoir mal au derrière en toute sûreté". En 1762, eut lieu un échange d’épitres et d’écrits relatifs à la poésie, dont L’Ode sur le temps de Thomas, couronné par l’Académie française, les Réflexions sur l’ode, lues par d’Alembert à l’Académie française dans la séance du 25 août, comme une sorte de réponse à l’épître de Frédéric II intitulée "Facétie au Sieur d'Alembert, grand géomètre, indigné contre le frivole plaisir de la poésie". Référence : Correspondance complète de J. J. Rousseau, institut et musée Voltaire, 1965, volume 47, p. 299, n° 2722bis.