Lot 75
  • 75

FLAUBERT. LETTRE AUTOGRAPHE SIGNÉE À BAUDELAIRE, CROISSET. 13 JUILLET [1857], 3 P. À PROPOS DES FLEURS DU MAL

Estimate
12,000 - 15,000 EUR
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Description

  • Flaubert, Gustave
  • Lettre autographe signée à Charles Baudelaire, datée Croisset. 13 juillet [1857],
3 pages in-8 (215 x 136 mm) à l’encre noire sur un bifeuillet de papier vergé bleu, sous chemise demi-maroquin noir moderne. Lettre enthousiaste à propos des Fleurs du Mal : « Vous avez trouvé le moyen de rajeunir le romantisme ». Extraordinaire rencontre de deux des plus grands créateurs du XIXe siècle, ayant tous deux fait paraître leur chef-d’œuvre cette même année. Admirable page de critique littéraire. Les Fleurs du Mal avait été mis en vente le 25 juin 1857 et le 13 juillet, Flaubert lui écrit cette lettre après en avoir achevé la lecture. La précision de ses remarques témoigne de sa lecture attentive. J’ai d’abord dévoré votre volume d’un bout à l’autre, comme une cuisinière fait d’un feuilleton, et maintenant depuis huit jours, je le relis, vers à vers, mot à mot et, franchement, cela me plaît et m’enchante. Vous avez trouvé le moyen de rajeunir le romantisme. Vous ne ressemblez à personne […] L’originalité du style découle de la conception. La phrase est bourrée par l’idée, à en craquer. Il mentionne ensuite divers poèmes qui l’ont plus particulièrement frappé : La Beauté, L’Idéal, La Géante, Une Charogne, Le Chat, Le Beau Navire, à une Dame créole, Spleen, et souligne : Ah ! vous comprenez l’embêtement de l’existence, vous ! Il raffole aussi de Tristesses de la lune, dont il cite deux vers, admire le Voyage à Cythère puis refuse de faire des critiques : je ne suis pas sûr de les penser moi-même dans un quart d’heure. Lorsqu’il le reverra cet hiver, à Paris, il lui posera seulement, sous forme dubitative et modeste, quelques questions. Ce qu’il admire surtout dans le livre, c’est que l’art y prédomine. Et il conclut par ces lignes : Et puis vous chantez la chair sans l’aimer, d’une façon triste et détachée qui m’est sympathique. Vous êtes résistant comme le marbre et pénétrant comme un brouillard d’Angleterre. Les deux hommes s’étaient rencontrés chez Me Sabatier et partageaient une admiration réciproque. Cette même année, en avril, avait paru Madame Bovary. Baudelaire, comme Flaubert, devra subir le réquisitoire du même procureur, Ernest Pinard. Madame Bovary sera épargné et seuls six poèmes des Fleurs du Mal seront condamnés. Cette lettre fut publiée et reproduite dans Charles Baudelaire, étude biographique par Eugène Crepet en 1906. Correspondance, éd. J. Bruneau, Pléiade, t. II, p. 744-745, avec la mention “Autographe non retrouvé”. Texte extrêmement fautif. — Lettres à Baudelaire, éd. Cl. Pichois, La Baconnière, 1973, p. 150-151. Petites déchirures sans manque à la pliure du second feuillet et à la pliure centrale.