Lot 141
  • 141

APPUIE-TÊTE, LUBA-SHANKADI, ATTRIBUÉ AU MAÎTRE DE LA COIFFURE EN CASCADE, RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO |

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Description

  • haut. 17 cm ; 6 3/4 in
Appuie-tête, Luba-Shankadi, Attribué au Maître de la coiffure en cascade, République Démocratique du Congo

Provenance

Collection Charles Ratton (1895-1986), Paris
Alain de Monbrison, Paris
Merton Simpson (1928-2013), New York
Collection Frum, acquis en 1984

Exhibited

Paris, Musée Dapper, Luba: aux Sources du fleuve Zaire, 25 novembre 1993 – 17 avril 1994

Literature

Fagg et Plass, African Sculpture: an Anthology, 1964, p. 88
Bassani, "Il maestro della capigliagtura a cascata" in Critica d'Arte, 1976, p. 81, n° 12
Trowell et Nevermann, African and Oceanic Art, 1968, p. 140
Neyt, Luba: aux Sources du fleuve Zaire, 1993, p. 181

Catalogue Note

L’emblématique corpus des appuis-nuque du Maître de la Coiffure en Cascade ne compte que dix-huit œuvres, dont seules onze présentent, comme ici, une unique figure cariatide. Celle de la prestigieuse Collection Frum - l’une des seules encore conservées en mains privées – s’impose comme une insigne rareté. Ce sculpteur doté d’une prodigieuse individualité artistique fut identifié par William Fagg et Margaret Plass en 1964 dans African Sculpture, précisément à partir de l’appui-nuque Frum - à l’époque dans la Collection de Charles Ratton. Il y est décrit en ces termes : « un appui-nuque […] d'un miniaturiste de génie mais anonyme, appartenant au groupe des Baluba Shankadi dans le sud-est du Congo, et que nous appellerons le Maître de la Coiffure en Cascade; environ une douzaine de ses sculptures sont connues, toutes de brillantes compositions asymétriques » (Fagg et Plass, 1964, p.88). Le premier appui-nuque de ce maître sculpteur à entrer dans une collection européenne (Museo di Antropologia ed Etnologia de Florence, inv. n° 8312) fut collecté en 1901 par Ernesto Brissoni « dans le village de Kinkondja, sur le lac Kisale ». On considère aujourd’hui que ces sculptures, caractérisées par une coiffure en pagode constituée de deux amples ailes superposés et délicatement gravées de lignes parallèles, furent en réalité l’œuvre de deux maîtres distincts, que François Neyt situe dans le petit royaume de Kinkondja, près du lac Kisale, dans la région de Shaba (Neyt, Luba : aux sources du Zaïre, 1993, p.182-192).

Les appuis-nuque ont longtemps constitué un élément essentiel de la culture africaine, contribuant à préserver les coiffures sophistiquées et fragiles arborées par les membres de l’aristocratie. Chaque coiffure était dotée d’une signification sociale et cérémonielle importante, et la dimension esthétique faisait partie intégrante de leur création. En Afrique, l’immense créativité prévalant aux coiffures se reflète dans la virtuosité appliquée aux appuis-nuque sculptés pour les protéger. La coiffure en cascade représentée sur notre appui-nuque, appelée mikanda, fut documentée par les voyageurs européens qui parcoururent la région à la fin du XIXe siècle, et « disparut complètement vers les années 1928-1930 » (Vanderhaeghe, in Falgayrettes-Leveau, Parures de tête, 2004, p. 215).

Cet appui-nuque est également exceptionnel par le dynamisme de la pose. Un genou dressé, l’autre jambe repliée vers l’arrière dans un mouvement qui défie le naturel, le corps s’équilibre dans la prodigieuse tension des membres. Le pied déployé à l’horizontale serait, d’après François Neyt, caractéristique des sculpteurs de la région de Kinkondja (cf. idem, p. 184). Les yeux en forme classique d'amande se resserrent, accentuant avec les lèvres pincées la prégnance du visage. Les mains tiennent une pipe posée en équilibre sur le genou, le porteur s’apprêtant à fumer une substance psychoactive. Cette très rare iconographie rejoint la croyance Luba attribuant aux appuie-tête la fonction de « support du rêve » : ils influeraient sur les rêves, considérés comme prophétiques.  Elle se retrouve dans deux seuls autres appuis-nuque cariatides du maître, l'un conservé au Metropolitan Museum of Art (New York), l'autre au British Museum (Londres).

Le rythme des lignes crée un prodigieux jeu d’équilibre, aboutissant à une harmonie dans la posture asymétrique : la position diagonale de la jambe fait écho à celle des bras et à l'inclinaison de la pipe, tandis que les ailes de la coiffure et le pied placé au dos de la figure trouvent une correspondance dans la pipe et le pied étiré vers l'avant. Ce jeu de lignes raffiné accentue la délicatesse des membres élancés caractéristiques de la statuaire Luba-Shankadi.

Ce chef-d'œuvre de la collection Frum s’impose aussi comme celui du Maître de la Coiffure en Cascade. A la sophistication du rythme et au génie de la sculpture s’ajoute la patine profonde dont les nuances témoignent d’un usage prolongé et de l’attention qui lui a été porté. La rare iconographie révélant l’importance de son possesseur, de même que sa provenance emblématique dans l’histoire des collections occidentales en confirment l’éminence.

Headrests have long been an essential part of many African cultures, helping to preserve the fragile and elaborate coiffures of people of high rank. Each hairstyle carried an important social and ceremonial significance however the aesthetic dimension was also integral to their creation; traditional coiffures were often elaborate, and the creativity is also reflected in the craftsmanship of the headrests carved to protect them. The cascading hairstyle represented on the figure within the present headrest is named “mikanda” and “distinguishes numerous figures sculpted by the Luba Shakandi” (Vanderhaeghe, in Falgayrettes-Leveau, Parures de tête, 2004, p. 215).

Of the known neckrests attributed to the Luba-Shakandi, those created created by the exceptional “Master of the Cascade Coiffure” are the most refined and remarkable. Only eighteen works are known by this hand and of these eleven are single caryatid figures. The Frum Shankadi neckrest is one of the few left in private hands. When writing about the headrest sold at Sotheby's in December 2006, Bassani stated "the atelier would have been in operation between the end of the 19th century and the first two decades of the 20th century", a hypothesis reinforced by records of the earliest collected neckrest by this hand, which was collected in 1901 by Brissoni and is now housed in the Museo di Anthropologia e Etnologia in Florence.

This individualist carver was first identified by William Fagg and Margaret Plass in their 1966 book African Sculpture when discussing this exact headrest, formerly in the collection of the great dealer Charles Ratton; they write, “a headrest […] by a great but anonymous miniaturist of the Baluba Shakandi in the south-east Congo whom we may call the Master of the Cascade Coiffure; a dozen or more of his carvings are known, all of them brilliant asymmetrical compositions” (Fagg and Plass, p.88). It is now thought there were likely two masters, whose carvings are characterised by the exaggerated coiffure with two delicate fins layered in a pagoda style, each incised with parallel vertical lines. Francois Neyt identified the location of these master carvers as the small kingdom of Kinkondia, close to Lake Kisale in the Shaba region. (Neyt, Luba, p.182-183)

The Frum headrest is astonishing not only because of the extravagant coiffure, but also in the dynamism of the pose of the kneeling figure.  With one knee raised, the left leg sweeps around behind the back in an almopst acrobatic form. The right horizontal foot is characteristic of carvers from the Kinkondja region, according to Neyt[2] and the body is poised and taut. The characteristic almond-shaped eyes are narrowed and focused and the mouth pursed in to a pout. Both hands grasp a pipe that is balanced upon the knee which, according to Fagg and Plass would have been used to smoke bhang or Indian hemp. Only two other headrests from the coprus depict the figure in an assymetric pose with a pipe: one in the MET, New York and one in the British Museum, London.

This masterpiece from the Frum collection is the magnum opus of the Master of the Cascade Coiffures. In addition to its rhythmic sophistication and its sculptural genius, the deeply nuanced patina attests to its prolonged use and to the caring attention given to it. Both the rare iconography, revealing the importance of its owner, as well as its emblematic provenance in the history of Western collections confirm this work’s pre-eminence.