Lot 28
  • 28

Louis XIV exhortant le Dauphin, encre et peinture sur vélin, vers 1670

Estimate
50,000 - 80,000 EUR
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Description

  • giltwood, paper
  • Cadre 89 x 51 cm
  • Frame 35 x 20 in
encre et peinture sur vélin représentant, en partie supérieure, Louis XIV exhortant le Dauphin, surmontés par la colombe du Saint-Esprit, séparés par les insignes de la monarchie française posés sur un coussin et entourés de reliefs représentant les allégories de la Charité et de l'Espérance ; en partie inférieure, inscription calligraphiée d'une exhortation du Roi au Dauphin, terminée par un monogramme couronné aux L entrelacés :
Adore Dieu, Createur de l'Univers, & l'ayme de toute ton ame, de t'avoir fait naistre Catholique, Apostolique & Romain. Honore ceux qui t'ont mis au monde. Sois humain & bienfaisant à tous les hommes. Ayme tes Proches, & tes Amys: mais plus que tout, ayme ta Patrie, & procure le bien public. Respecte les Gens de bien. Eloigne de toy les mechans, & reconnois les bien faits. Connois-toy toy mesme. Exerce moderement ton corps: mais applique fortement ton esprit. Ecoute tout. Parle peu. Regle tes pensees, & pese tes paroles. Abhorre le Menteur & le mensonge. Ne faits jamais de railleries picquantes. Pardonne beaucoup aux autres, rien a toy. Sois plutost ennemy de tes vices, que censeur de ceux d'autruy. Songe que le repentir fuit de pres la faute, & que le premier fruict des bonnes actions, est le plaisir de les avoir faites. Ne prends jamais de mauvaises voyes, pour arriver a une bonne fin. Tiens les Flateurs pour tes plus grands ennemis, & pour tes meilleurs amis, ceux qui te voyent, plutost pour toy, que pour eux mesmes. Sois égal, autant dans la prosperite, que dans l'adversité. Prends conseil, mais forme tes resolutions toy mesme: Sois lent a les prendre, mais prompt à les executer. Sois ferme & non pas opiniastre: & si tu as a changer d'avis, que ce soit par raison, & non par legereté. Desire ce qui t'est propre. Supporte ce qui t'arrive. Sois le maistre de tes passions, & non l'esclave. Possede les grandeurs & les richesses, sans en estre possedé. Ayme la belle gloire. Ne passe point de jour sans faire du bien a quelqu'un; le temps qui n'est point employé aux bonnes actions, est un temps perdu. Ayme la justice sur toutes choses, & rends toy protecteur de ceux qui souffrent persecution. N'apprehende la mort, ny ne la souhaite; mais croy que qui survit a sa conscience & à son honneur a trop vescu. ;
dans son cadre en bois sculpté et doré sommé d'un L et d'une couronne fermée, orné d'une fleur de lys et de rameaux de laurier et de chêne en partie inférieure

Provenance

Vente Arts of France, Christie's New York, le 23 octobre 1998, lot 18

Catalogue Note

Au début de son règne personnel, Louis XIV entreprit de dicter à de proches collaborateurs quelques notes et textes connus aujourd’hui sous le nom de Mémoires de Louis XIV et de Mémoires pour l’instruction du Dauphin. Fortement imprégnés de stoïcisme, ces derniers étaient notamment destinés à  préparer son fils, Louis dit le Grand Dauphin (1661-1711), à l’exercice solitaire du pouvoir à travers l’apprentissage de la maîtrise de soi et une conduite chrétienne exemplaire. C’est dans ce contexte qu’il faut replacer l’exhortation calligraphiée sur ce vélin, dont le texte final fut peut-être fourni par un membre de l’Académie des Inscriptions et des Belles Lettres, fondée en 1663 afin de rédiger les devises latines et françaises destinées à être inscrites sur les édifices, les médailles et les monnaies du roi. 

Le recours au vélin témoigne de la permanence du manuscrit au XVIIe siècle comme forme singulière et prestigieuse de publication d’un texte. Louis XIV manifestait un intérêt certain pour cet art de l’enluminure qui perdurait malgré la prédominance de l’imprimerie. En 1660, il avait notamment hérité de son oncle Gaston d’Orléans sa collection de peintures de fleurs et d’oiseaux exécutées sur vélin par le miniaturiste Nicolas Robert. Plus tard, il encouragea la réalisation de livres liturgiques pour la chapelle de Versailles par les pensionnaires des Invalides : ces anciens soldats, spécialisés dans l’enluminure des manuscrits, formèrent bientôt l’atelier des Vélins du Roi, utilisant les mêmes techniques et les mêmes procédés qu’au Moyen-Age.

Il est possible que ce vélin et son cadre aient été commandés par le roi et fait partie d’une série plus importante destinée à édifier le cœur et l’esprit de son fils, le Grand Dauphin.