Lot 5
  • 5

Nicolas de Staël

Estimate
800,000 - 1,200,000 EUR
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Description

  • Nicolas de Staël
  • Nature morte
  • porte le cachet de la signature de l'artiste au dos
  • huile sur toile
  • 46 x 54,8 cm; 18 1/8 x 21 9/16 in.
  • Exécuté en 1955.

Provenance

Collection particulière, Europe
Galerie Jeanne Bucher, Paris
Haaken Christensen, Norvège
Vente: Sotheby's, Londres, Contemporary Art Evening sale, 9 février 2006, lot 24
Acquis lors de celle-ci et transmis par descendance au propriétaire actuel

Exhibited

Oslo, Henie Onstad Kunstsenter, Sal Haaken, 2003; catalogue, p.204, illustré en couleurs

Literature

Jacques Dubourg et Françoise de Staël, Nicolas de Staël, Catalogue Raisonné des peintures, Paris, 1968, p.381, no.1025, illustré
Françoise de Staël, Nicolas de Staël, Catalogue Raisonné de l'oeuvre peint, Neuchâtel, 1997, p.620, no.1044, illustré en couleurs

Catalogue Note

Peint à Antibes en 1955, Nature morte  est une œuvre exemplaire de la manière et de la vision synthétiques à laquelle Staël parvient dans les mois ultimes de l’année 1954 et du début de l’année 1955.

 

Le corpus des natures mortes de Nicolas de Staël s’inscrit dans la lignée d’un genre qui va des natures mortes illusionnistes des Pays-Bas du XVIIème en passant par les bodegones minimalistes du Siècle d’or espagnol jusqu’aux premières pommes de Cézanne et les dernières compositions de Braque.


Mais dans les toiles de Staël où se dissolvent les frontières entre figuration et abstraction, l’objet n’est pas celui qui est identifié et représenté – fruits, fleurs, bouteilles, pinceaux ou palette – mais  la peinture elle-même. Quasi-conceptuelles, les natures mortes de Nicolas de Staël sont pour l’artiste le lieu d’expérimentation de procédés picturaux et d’aboutissement de ses réflexions sur l’espace, la forme et la couleur dans l’espace.


«  Chaque peintre fait ce qu’il peut avec ou sans un culte pour l’objet, mais c’est toujours un prétexte. On ne peut absolument pas penser à quelque objet que ce soit, on a tellement d’objets en même temps que la possibilité d’encaissement s’évanouit. Chez Rembrandt un turban des Indes devient brioche, Delacroix le voit comme meringue glacée, Corot tel un biscuit sec et ce n’est ni turban ni brioche ni rien qu’un trompe-la-vie comme elle sera toujours, la peinture, pour être. Objet, oui, inconnu familier, pigment » (Nicolas de Staël, Lettre à Pierre Lecuire, Paris 18 novembre 1949).

Nature morte est d’une autre dimension encore : une œuvre où l’objet n’est plus seulement l’objet de la peinture : le peintre lui-même.

D’un point de vue plastique, Nature morte  montre un exceptionnel degré de maîtrise de la spatialité. Au choc des axes – horizontalité de la table versus verticalité des bouteilles – répond la conjonction des plans tempérée par le tressaillement de la ligne d’horizon qui suggère subtilement la profondeur. Pour autant, dans Nature morte, le génie de Nicolas de Staël intègre une autre dimension : une dimension abstraite qui s’épanouit dans les espaces vides, entre les formes nimbées de vapeur et les lignes indéterminées.  L’équilibre réputé implacable est visuellement perturbé par ces circulations d’espaces intermédiaires sans pour autant affecter les rapports harmonieux des objets entre eux et dans leur rapport à l’artiste.

 

L’harmonie de Nature morte est servie par la fluidité de la touche. La matière est étirée au pinceau succédant à la truelle et au couteau des années précédentes.  Peint à la manière des paysages d’Italie où la luminosité a induit une intensification des couleurs et un allègement subséquent de la couche picturale, Nature Morte  a la matière des grands horizons. Entre opaques et transparences,  glacis et halos vaporeux, Nature Morte  impose et confirme une harmonie oscillante hors du commun.  Il faudra se tourner vers Rothko pour retrouver un tel mystère et une telle transcendance de la matière. 

Painted in Antibes in 1955, Nature morte is also an example of the synthetic vision and style that Staël reached in the last months of 1954 and the beginning of 1955.

 

The corpus of Nicolas de Staël’s still-life works fits into a genre that goes back to the Dutch 17th century illusionist still-lifes, and includes the minimalist bodegones of the Spanish Golden Age, up to Cézanne’s first apples and Braque’s last compositions.

But in Staël’s canvases, where the limits between figuration and abstraction are dissolved, the object does not correspond to its representation – fruits, flowers, bottles, paintbrushes or palettes – but painting itself. Nicolas de Staël’s still-life works are almost conceptual and a means for experimenting with pictorial techniques and for exploring his thoughts on space, form, and color in space.


“Each painter does what he can, with or without a cult for the object, but it is always a pretext. We absolutely cannot think about any possible given object, we have so many objects at the same time that the possibility of absorbing them vanishes. With Rembrandt an Indian turban becomes a brioche, Delacroix sees it as an iced meringue, Corot like a dry biscuit and it is neither a turban, nor a brioche, nor anything other than an illusion, as painting will always be, in order to exist. An object, yes, a familiar unknown, pigment.” (Nicolas de Staël, Letter to Pierre Lecuire, Paris, November 18, 1949.)

Nature morte can be understood in yet another aspect: an artwork where the object is no longer the subject of the painting: an artwork where the objects represents the painter himself.

From a technical standpoint, Nature morte demonstrates an exceptional control of spatiality. The clash of two axes – the horizontal table versus the vertical bottles – contrasts with the toned background and the quivering line of the horizon that gives a subtle impression of depth. And yet, in Nature morte, Nicolas de Staël’s genius takes on another dimension: an abstract dimension that spreads into empty spaces, between haloed forms and vague lines. The acclaimed unremitting balance of the composition is visually disturbed by the movement of intermediary spaces, yet this does not affect the harmonious relationship between the objects and their connection with the artist. 

The fluid paintwork of Nature morte creates a harmony. The paint is drawn out by the brush and replaces the trowel or the knife of previous years. Painted in the manner of Italian landscapes where light intensifies color and induces a subsequent reduction of pictorial layers, Nature morte has the substance of great horizons.  Between the opaque and the transparent, the glaze and hazy aureoles, Nature morte imposes and confirms an exceptional, vacillating harmony. Such mystery and transcendence of matter as can be found in the works by Rothko.