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Anonyme
Description
- Anonyme
- 'Obsessions', vers 1865-70
- photograph
Provenance
Werner Bokelberg, Hambourg
Collection particulière europénne
Literature
Dominique de Font-Réaulx, "Notice de l'acquisition de six feuilles de photocollages, dits Obsession", in: 48/14, no. 22, 2006, pp. 60-61.
Condition
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Catalogue Note
Texte de Laurence Joseph, psychanalyste.
Avant la folie était disqualifiée et rejetée, de plus en plus elle va intéresser et susciter la curiosité. Une grande référence de cette époque est le Psychopathia sexualis de Kraft Ebing qui se veut un état des lieux en matière de sexualité et surtout en matière de perversions et de déviances. L'œuvre d'Havelock Ellis est à considérer également dans le même registre; c'est bien entendu l'œuvre de Freud et la naissance de la psychanalyse qui incarne la sexualité et le fantasme comme axes déterminants de la compréhension de la nature humaine.
Impossible de déterminer si l'auteur de ces planches s'inspire de ses fantasmes propres ou met en scène celui d'un autre, lu ou entendu. La présence du journal peut tout autant amener l'idée du fait divers que celle du foyer ou de la mouvance radical socialiste de tout le mouvement naturaliste.
L'enjeu majeur de ces planches n'est peut-être pas là mais davantage dans ce cinéma intime qui nous est ici proposé. Ces collages sont très semblables à ce que Freud décrit du travail du rêve et en premier lieu du fait de la récurrence de personnages identiques tenant des rôles différents. Freud explique dans L'interprétation des rêves que le rêveur peut incarner plusieurs personnages à la fois venant ainsi illustrer toutes les directions de la pulsion. Il est bien clair que c’est ainsi qu’apparaît l’homme, il rêve à son crime, s’imagine élaborant les détails de la scène avec sa femme ou sa bonne puis décline les images du passage à l’acte. Jusqu’ à nous laisser voir les pieds du cadavre dans l’entrebâillure de la porte.
La délectation est dans la mise en scène, l’organisation des détails. L’auteur est en plein montage : montage cinématographique et montage pulsionnel. Il semble en effet que l’enjeu est de mettre en image la pulsion, de l’habiller et de la colorer. Chaque collage fonctionne comme une greffe, une érotisation supplémentaire. En particulier dans ce mouvement entre la partie haute et la partie basse, c'est-à-dire le passage du deux au trois, en baissant d'un étage, la femme apparaît comme nœud fantasmatique. La femme est d'ailleurs toujours au centre, c'est elle qui divise l'homme.
Le sujet est divisé (entre le conscient et l'inconscient) : à la fois bourreau et martyr, déjà tout à sa culpabilité alors qu'il commet le crime, incarnant le Christ ou saint Sébastien, il est à cette place en même temps qu'il imagine le supplice à venir. La richesse du photomontage réside dans la possibilité de montrer cette coexistence des affects, dans une forme d'effets spéciaux à visée introspective.
Il s’agit là d’une véritable écriture du fantasme où le sujet tourne autour de la pulsion dans toutes ses modulations, en somme chaque photographie contient l'autre dans le fantasme, au-delà d'un théâtre de la cruauté comme l'écrirait Artaud, c'est un théâtre de l'inconscient que l'auteur nous propose, le cinéma intime de son obsession.
Nous sommes là entre l'émergence de la tentative cinématographique et la psychanalyse en images.
Le mécanisme de répétition est identifié par Freud comme le signe de la pulsion, les planches illustrent parfaitement ce point, c'est en insérant de nouvelles photos, en les bordant l'une contre l'autre que l'auteur accède à son écriture fantasmatique, chaque photographie fonctionnant ainsi comme une lettre, chaque phrase donnant sa consistance à l'obsession.