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Nicolas Bertin
Description
- Nicolas Bertin
- L'enfer des danaïdes
- Huile sur panneau
Provenance
Collection du Prince de Conti;
Sa vente, Palais du Temple, Maître Remy, 8 avril 1777, n°649 (vendu avec son pendant);
Galerie Matthiesen Fine Art Ltd, Londres en 1989;
Acquis à la galerie par l'actuel propriétaire.
Exhibited
A selection of French Paintings 1700-1840 offered for sale, 6 juin - 28 juillet 1989, Matthiesen Fine Art Ltd, Londres, n°4
Literature
Condition
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Catalogue Note
Les Danaïdes en enfer est un thème rare dans la peinture occidentale des XVIIème et XVIIIème siècles. Mis à part quelques dessins par Le Brun ou Verdier, on en trouve très peu d'illustration. Ce tableau peint par Nicolas Bertin représente les cinquante filles de Danaos tentant désespérément de remplir un baril sans fond. Selon Platon (La République, livre II) elles furent condamnées à ce supplice pour avoir assassiné leurs maris, fils d'Aigyptos, durant leur nuit de noce. Toutefois une autre version du mythe des danaïdes raconte l'histoire de nymphes assoiffées puisant une eau qu'elles ne peuvent retenir (Ovide, Les Métamorphoses, livre IV, verset 462). Le choix du sujet est caractéristique de notre artiste qui préférait exploiter des thèmes mythologiques inhabituels, très probablement dictés par un commanditaire exigeant.
Dans le cas de notre tableau la commande émanerait très certainement de M. de Saint-Bonnet, mécène assidu de Bertin dès les premières années de sa carrière. Ce collectionneur possédait en effet au moins quatre-vingt-dix œuvres de l'artiste. Parmi celles-ci se trouvait une paire composée d'une représentation d'Apollon et les muses sur le Parnasse et des Danaïdes en enfer. Pierre Rosenberg a identifié le premier tableau avec une composition conservée au Musée de Vulliod Saint Germain à Pézenas dont les dimensions sont identiques à celles de notre tableau qui peut alors être considéré comme son pendant. La paire serait une opposition symbolique, probablement à portée morale, entre les arts incarnés par les muses du Parnasse et la décadence des nymphes vouées aux enfers.
Si le format et le sujet permettent d'identifier notre tableau comme l'oeuvre manquante pour reconstituer la paire que possédait Saint-Bonnet, d'autres éléments d'ordre stylistique nous renseignent sur sa paternité. Bertin avait hérité de son maître Bon Boulogne le goût de la production d'œuvres de petites dimensions influencées par les tableaux de cabinet hollandais très en vogue sous la Régence. Cela explique le format de notre tableau certainement fait pour s'adapter aux lambris menuisés des nouveaux intérieurs français. De plus, la gamme chromatique de notre oeuvre correspond à la palette chatoyante typique de l'artiste qui, influencé alors par les coloris vénitiens, avait surpassé le caravagisme à l'honneur au siècle précédent. Bertin a d'ailleurs souvent été confondu avec le peintre vénitien Giulio Carpioni dont le style aux couleurs chatoyantes et lumineuses et au dessin maniériste se retrouve nettement dans toute la production du peintre comme l'illustre notre panneau.
Une confrontation avec plusieurs autres tableaux du peintre nous renseigne sur la datation de l'œuvre qui aurait été peinte durant les années de maturité de l'artiste. Par exemple Jupiter et Léda (Carcassonne, Musée des Beaux-arts) montre les mêmes éléments à la manière de Carpioni : une juxtaposition des figures et non une composition savamment articulée et surtout un paysage au traitement schématique, ce dernier point étant typique du travail de Bertin. De plus, le regroupement des danaïdes peut être facilement comparé à celui des Hespérides visibles sur la gauche d'Hercules tuant les soldats de Busiris (Autun, Musée Rollin) daté entre 1715 et 1720, période correspondant à la réalisation du tableau du Musée de Carcassonne et à laquelle nous pouvons rattacher l'œuvre que nous présentons.