PF1203

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Lot 184
  • 184

Welles, Orson

Estimate
30,000 - 50,000 EUR
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Description

  • Welles, Orson
  • projets et notes pour les décors du film "Le procès", adaptation cinématographique du roman de Kafka.[Zagreb et Paris, 1962].
95 feuillets dont 91 dessins (différents formats, la plupart sur ff. in-4 (295 x 211 mm) et 4 feuillets de texte. En feuilles. Au feutres de couleur et au crayon noir.

Catalogue Note

Extraordinaire dossier contenant 91 croquis en couleurs et notes de la main d'Orson Welles, élaborant les lieux angoissants dans lesquels se débattront K. (Anthony Perkins), son avocat (Orson Welles) et Leni (Romy Schneider).

Malgré l'intense dédain qu'exprimait Kafka pour le cinéma, dont il ne supportait pas la "superficialité", Welles et Kafka sont deux artistes que tout rapproche : ils sont auteurs tous deux d'oeuvres inachevées, quasiment mais non terminées ; la théatralité de Kafka attire Welles, qui lui aussi est un homme de théatre avant d'être cinéaste ; enfin la dimension politique du Procès de Kafka attire Welles, homme fasciné par le pouvoir. "J'aime faire des films où je puisse m'exprimer en tant qu'auteur plutôt que comme interprète" (1964). En réponse aux critiques d'infidélité à l'oeuvre de Kafka reçues par son film, il déclare : "Kafka n'est pas l'écrivain extraordinaire que l'on s'accorde aujourd'hui à reconnaître. C'est pourquoi je n'étais pas soucieux de fidélité excessive et que je pouvais faire un film de Welles" (Cahiers du cinéma, avril 1965). Plus que de l'oeuvre de Kafka, c'est de ses préoccupations personnelles que s'occupe Orson Welles lorsqu'il décide de tourner Le Procès : " Dorénavant je m'intéresse plus aux abus de la police et de l'Etat qu'à ceux de l'argent, parce qu'aujourd'hui l'Etat est plus puissant que l'argent. Je cherche donc quelque moyen de dire ça." (CC, juin 1958).

Oeuvre d'auteur par excellence, le Procès permit à Welles de créer des décors futuristes, absolument inédits, aménageant l'espace pour filmer à sa guise : plongées et contre-plongées, ampleur du champ de vision, saturation "baroque" de l'espace, décors soulignant les décadrages, permettant l'emploi du grand angle qui distord les lignes géométriques, amplifiant les lumières très contrastées que Welles aime utiliser sur des angles cassés pour projeter ses ombres brisées.

On y découvre :
-       l'entrée des bureaux du tribunal : 4 dessins annotés
-       les bureaux du tribunal : un titre et 11 dessins annotés
-       les rues : 16 dessins annotés, la plupart au crayon avec notes tapuscrites et un titre
-       l'église : 6 dessins, dont 5 annotés
-       la chambre d'interrogatoire, le tribunal : 15 feuillets, dont 14 dessins annotés, à la main et à la machine, parmi lesquels le dessin portant l'envoi à Jean Mandaroux
-       l'atelier de Titorelli : 16 dessins, dont 7 annotés
-       l'appartement des avocats, la bibliothèque, et la chambre de K: 23 dessins dont 22 sont annotés, et 2 feuillets tapuscrits donnant ses instructions

Sur 91 feuillets de diverses tailles, aux feutres en couleurs ou ombrés au crayon noir, Orson Welles a croqué ces lieux et les a annotés rapidement, le plus souvent à la main, parfois à la machine à écrire : Corridor of crazy wooden slats (like Titonelli's studio) through which K escapes from law court offices ; Hanging lights (K's office) ; Law court Offices, wooden partitions, not walls, each office a small cubicle, considerable space between these partitions and glass ceiling ; Computor (Electronic brain) ; Section of very big hanging ceiling ; Project for the walls, with cut-out profile skyline behind ; Vista of flag-poles and tattered banners (such as used to be a feature in front of the ruins in East Berlin) ; Miss Pitl ? Cousin Irmie ? ; The end (execution) ?

Il s'agit du tout premier jet de son projet de décors. Les premiers décors sont à construire à Zagreb (Yougoslavie), où Welles compte utiliser le pavillon chinois, en attendant de savoir si un tournage à la Gare d'Orsay, alors un vaste chantier, lui sera accordé. Les points d'interrogation sont témoins du stade tout à fait primitif de  l'élaboration du projet. Orson Welles travaillant toujours dans l'urgence, faute de moyens, la plupart de ces croquis serviront de projet abouti. Nombreuses sont les notes trahissant le manque cruel de finances du réalisateur, obligé pour cela de commander des décors à matériaux peu coûteux, astucieux, amovibles, réutilisables si possible : These perfectly plain columns are to be moved around (easily) for framing in the foreground and in various exterior set-ups... ; Columns for church (these should be easy to move) ; These windows [de l'église] are dimensional. But have no solid walls...surrounding them – just blackness ; With the wooden platform taken away, the basic structure of the walls could also be used in other scenes (entrances and corridors)...

Ces recommandations étaient destinées à son chef décorateur, le très ingénieux Jean Mandaroux, qui y a porté quelques annotations. C'est à Mandaroux qu'Orson Welles offre ce dossier. Il porte sur le dessin du couloir par lequel s'échappe K ce bel envoi : For my good friend Mandaroux, the very best of all cinema architects. From his friend Orson Welles.