Lot 48
  • 48

Attribué à Philippe de Champaigne

Estimate
60,000 - 80,000 EUR
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Description

  • Philippe de Champaigne
  • Portrait de mère Agnès et soeur Angélique de l'abbaye de Port Royal des Champs
  • Huile sur toile

    Attributed to Philippe de Champaigne ; Portrait of mother Agnes and sister Angélique from the abbey of Port Royal des Champs ; Oil on canvas

Provenance

Abbaye de Port Royal des Champs avant 1709 ;
Donné par les sœurs de l'abbaye aux ancêtres des actuels propriétaires durant la période révolutionnaire.

Exhibited

Port Royal et le Jansénisme, Paris, Bibliothèque Sainte Geneviève,1925, n° 64 ;
Philippe de Champaigne, Gand, Museum voor Schone Kunsten, 1952, n° 73 (attribué à Philippe de Champaigne) ;
Philippe de Champaigne, Paris, Orangerie des Tuileries, 1952, n° 73 ?;
Philippe de Champaigne et Port Royal, Magny les Hameaux, Musée National des Granges de Port Royal, n° 72 ;
Blaise Pascal, Paris, Bibliothèque Nationale, 1962, n° 280 ;
Deux siècles de Jansénisme à travers les documents du fonds Port-Royal d'Utrecht, Paris, Archives Nationales, Paris, 1974, n° 218, reproduit en couverture (Attribué à Philippe de Champaigne ou à son neveu Jean Baptiste);
Trois hauts lieux d'Ile de France pour l'année du Patrimoine : Vincennes, Meudon, Port Royal des Champs, Sceaux, Musée de l'Ile de France, n° 166 (Philippe de Champaigne) ;
Philippe de Champaigne et Port Royal, Magny les Hameaux, 1995, n° 5 (Philippe de Champaigne ? Jean Baptiste de Champaigne ?) ;

Literature

Très probablement, H.Mabille, L'église de Port Royal des Champs (1204 -1710), Paris, 1901, p. 49 ;
A. Gazier, Port Royal au XVIIème siècle, images et portraits, Paris, 1909 ;
A. Mabille de Poncheville, Philippe de Champaigne, Paris, 1953, t.I, pp. 4-48, t.II, p. 140 ;
B. Dorival, Recherches sur les Granges, in « Chroniques de Port Royal, 1956, p. 19 ;
B. Dorival, A propos de l'exposition Philippe de Champaigne et Port Royal, in « La revue des Arts », 1957, n° 36, reproduit p. 765.
B. Dorival, Le Musée national des Granges de Port Royal, Paris, 1963, p. 19, fig. 6 ;
B. Dorival, Philippe de Champaigne, 1602 – 1674, La vie, l'œuvre et le catalogue raisonné de l'oeuvre, Paris, 1976, Vol. 2, p. 312, n° 1713, reproduit pl. 1713 ;
B. Dorival, Jean Baptiste de Champaigne, 1631 – 1681, La vie, l'homme et l'art, Paris, 1992, p. 30, reproduit, fig.13.
J. Gonçalves, Philippe de Champaigne, Paris, 1995, p. 110 reproduit (Jean Baptiste de Champaigne) ;
Très probablement, Philippe de Champaigne 1602 – 1674. Entre politique et dévotion, Lille, Genève, 2007, 2008, p. 215, notice du n° 58.

Condition

To the naked eye: The painting is in relatively good condition. It has been properly relined during the first half of the 20th century. This restoration hasn't flattened the painted surface and we can still appreciate the fine and precise touches of the painter. The work appears under a recent varnish, a bit thick and shiny. We remark, on all the surface, traces of dirty old varnish. There are some minor upheavals predominantly located in the upper part of the landscape in the background and in the upper right corner. We noticed a square of a different material (32 x 25 centimeters) in the lower right corner that corresponds to the masked face (see catalogue note). Under UV light: The painting appears under a thick green uniform varnish. We note restorations in the lower right corner that highlight the base of the table and the drapery of the tablecloth. There are some punctual retouching on the base and the cross of the crucifix. There is also an horizontal restoration (5 centimeters) close to the inscription INRI. There is an oblique restoration (15 centimeters) on the right below the kneeling sister. There are some very minor retouching in her white clothe and in her black well. We notice quite a number of spot of retouching in the sky and in the landscape on the background, few retouching on the chair between the two characters as well as some retouching in the clothes of the sister sitting and on her veil. There are two bands of restoration on the upper and lower edges (due to the friction of the frame).
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Catalogue Note

Le  tableau que nous présentons est une image importante de l'iconographie de Port-Royal. Il est à mettre directement en rapport avec l'une des œuvres les plus célèbres du XVIIème siècle français peinte par Philippe de Champaigne en 1662 : L'Ex Voto aujourd'hui conservé au musée du Louvre. Par sa facture bouleversante, mais aussi pour la scène qu'il présente l'Ex-voto est une œuvre iconique: la guérison miraculeuse de Sainte-Suzanne, fille de Philippe de Champaigne lui-même, allongée sur un lit, accompagnée de Mère Agnès en prière à côté d'elle. Touché par cette guérison miraculeuse, Philippe de Champaigne  immortalisa cet instant, portraiturant les deux sœurs lors de cette intervention divine symbolisée par la présence du rayon lumineux.

A l'instar de l'Ex-Voto, notre tableau baigne dans une atmosphère mystique de profond recueillement. Il présente une composition située dans un intérieur sobre qui s'ouvre sur un paysage offrant une vue sur l'abbaye de Port-Royal des Champs.
Notre tableau dépeint Mère Catherine Agnès de Saint-Paul dite Agnès Arnauld comme une femme pieuse et dévote, profondément inspirée et concentrée par la prière qu'elle adresse au seigneur (elle adopte la même posture que celle de l'Ex-Voto). A ses cotés, le portrait de Mère Angélique, adoptant la même pose que dans son portrait réalisé par Philippe de  réalisé par Champaigne en 1665 et conservé au Musée du Louvre.

Traditionnellement donné à Philippe de Champaigne, notre tableau a, depuis sa publication par Bernard Dorival, été de nombreuses fois rapproché de l'œuvre de Jean-Baptiste de Champaigne et il a beaucoup intéressé de nombreux historiens d'art. Même si l'attribution à Jean-Baptiste de Champaigne est récurrente, celle de Philippe de Champaigne demeure évoquée.  
De part sa provenance, sa facture fine et délicate, le charisme sobre de l'œuvre,  le traitement méticuleux des carnations et enfin les physionomies traitées avec minutie, l'évocation de Philippe de Champaigne nous semble être pertinente.
De plus, le traitement remarquable des mains, les réhauts de blancs aux extrémités des doigts, rappellent vivement la facture de Philippe particulièrement celle que l'on retrouve sur l'Ex-voto.
Le rendu du poids des drapés, aux plis lourds et pesants, dénote une force technique. Fermeté et sobriété semblent être clairement les deux points forts de notre tableau dont le résultat est cette formidable maîtrise technique.  

Un autre aspect de notre tableau, pour le moins mystérieux, est aussi à mettre en avant: la présence d'un visage masculin, visible uniquement à la radiographie, incrusté et cousu sous la couche de peinture dans l'angle inférieur droit du tableau. Comme le suggère Nicolas Sainte Fare Garnot, il pourrait s'agir ici du masque mortuaire de Saint-Cyran. Selon la légende, notre double portrait aurait été repeint en 1702 dans le but de dissimuler un portrait de Saint-Cyran existant dans le coin inférieur droit de l'œuvre. Le portrait de Saint-Cyran sur cette œuvre ne semble pas incohérent avec le reste du sujet car l'abbé de Saint Cyran était proche de mère Angélique Arnauld avec laquelle il a beaucoup correspondu.
Réalité ? Image subliminale désirée par les sœurs ? Nous ne pouvons malheureusement résoudre ce mystère.

Concernant la question du portrait à Port-Royal, il semblerait, comme l'affirme Louis Marin dans Philippe de Champaigne ou la présence cachée, que la tradition du portrait chez Philippe de Champaigne s'inscrive davantage dans une tradition affective. Ainsi, en dotant ces portraits individualisés d'une véritable présence charismatique, Philippe ne leur accorde pas seulement une physionomie ressemblante mais aussi et surtout une personnalité, une force d'esprit à la fois visible et discrète que lui seul était à même de dépeindre. L'artiste était particulièrement bien placé pour réaliser ces portraits car, reclus avec les sœurs, il partageait des liens très forts avec ces religieuses, liens d'autant plus renforcés par la guérison miraculeuse de sa fille.

Notre tableau, tout comme ceux du Louvre, met en valeur cette complicité qui unit le peintre à son modèle qui pose ouvertement, se livrant entièrement au peintre pour le laisser pénétrer son âme. Il y a dans ces trois tableaux la résurgence d'éléments semblables par leur traitement. On pense ici à l'attention portée à la physionomie mais aussi au traitement de la paille des chaises dont le rendu est saisissant. Quoiqu'il ne soit pas officiellement donné à Philippe, notre tableau présente donc de nombreux éléments de détails rappelant sa facture. On retrouve dans ce tableau le même paradoxe propre au métier du peintre à la fois fin, minutieux et discret tout en restant très efficace.