Yves Klein

Pierre Gasperini, Paris
Marie Raymond, Paris
Galerie Beaubourg, Paris
Jan Eric Lowenadler, Stockholm
Vente: Christie's Londres, 9 février 2005, Post-War and Contemporary, From a Private European collection, lot 29
Acquis lors de cette vente par le propriétaire actuel

Milan, Galleria Blu, Le Monochrome, 1969; catalogue, no.35, n.p, illustré
Turin, Galleria d'Arte, Yves Klein, 1969; catalogue, no.33, n.p, illustré
Paris, Galerie Beaubourg, Les Nouveaux Réalistes, 1976; catalogue, co-édité avec la Galerie Jean Larcade, p.II, illustré

Paul Wember, Yves Klein, Cologne, 1969, no.COS 31, p.121, illustré
Pierre Nahon, Histoire de la galerie Beaubourg 1936-2009, Volume 1, La Différence, Paris, France, 2009, p.159, illustré en couleurs

The colours are fairly accurate in the catalogue illustration, although the overall tonality is lighter in the original. The work is executed on a cream sheet of paper laid down on canvas. Four artist's pinholes are visible at each of the four corners. Some light remnants of glue probably due to a previous mounting are visible along the upper edge. This work is in very good condition.
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signed and dedicated Pour Parrain Joyeux Anniversaire Yves Monochrome Mai 60; pure pigment and synthetic resin on paper laid down on canvas. Executed in May 1960.

Corps, Couleur, immatériel.

En 1960 Yves Klein marquera dans l'histoire de l'art à plusieurs égards. En mars, il réalise la performance Anthropométrie de l'époque bleue chez le comte d'Arquian à la Galerie Internationale d'Art à Paris, où trois modèles nus enduits de peinture bleue apposent les empreintes de leurs corps sur des feuilles de papier blancs disposés sur les murs et le sol de la galerie. Il obtient au mois de mai 1960 le brevet pour sa formule de peinture sous le nom International Klein Blue (IKB). A l'automne de la même année, il réalise la fameuse photographie de son saut dans le vide. Tandis qu'en octobre 1960 encore, il fonde à son domicile le groupe des Nouveaux Réalistes avec Pierre Restany, Arman, François Dufrêne, Raymond Hains, Martial Raysse, Daniel Spoerri, Jean Tinguely et Jacques Villeglé.

C'est dans ce contexte d'activité explosive que l'artiste, dit Yves le Monochrome, exécute en mai 1960 COS31, qui s'apparente à l'une des oeuvres les plus extraordinaires du corpus des Cosmogonies. Cette série d'oeuvres est réalisée sur une courte période, d'une année à peine, entre 1960 et 1961, le long des berges du Loup à Cagnes-sur-Mer. " Au mois de mars 1960, Yves Klein réalise ses premières Cosmogonies. Ces oeuvres sont réalisées à l'aide des phénomènes atmosphériques et d'éléments naturels. L'oeuvre la plus fameuse appartenant à cette série est celle que l'artiste réalisa au cours d'un voyage de Paris à Nice. Il fixa sur le toit de sa voiture un papier fraîchement peint en bleu sur lequel il laissa agir les aléas météorologiques. En acceptant le hasard de cette technique comme un élément déterminant de sa démarche artistique, Yves Klein signe la forme sans en avoir décidé." (Catherine Millet, Yves Klein, Yves Klein la peinture subtilisée, Centre Georges Pompidou, 1983, p.123).

Confinant habituellement à l'abstraction, les Cosmogonies figuratives sont de véritables rareté. L'empreintes des roseaux de COS31 obtenues avec maestria rappellent les compositions natuarlistes des grands maîtres de l'art japonais. Yves Klein rend ici un hommage manifeste de son art à la culture japonaise, à laquelle il a emprunté l'influence du mysticisme ainsi que le judo pour le pratiquer à un niveau professionnel. C'est justement dans le judo que trouve la source du second élément figuratif emblématique de COS31 : l'empreinte du corps humain, aggrégeant ainsi COS31 au corpus des Anthropométries. Yves Klein a affirmé avoir eu cette idée à la suite d'un combat de judo auquel il avait assisté, quand le corps chaud et humide d'un judoka aurait laissé une trace en retombant sur le tatami: l'empreinte de la vie étant prise au vif, au sein même de l'action. Les Anthropométries représentent la manifestation physique de la vie elle-même avec le corps humain comme symbole de la chair - essence de la vie. Des femmes enduites de peinture à l'occasion, transformées en "pinceaux vivants", appliquent leur corps sur des feuilles de papier laissant ainsi leur trace sensible et colorée sur le support.

Le choix du bleu, couleurs dominante des Anthropométries, va dans le sens de la spiritualisation de la chair et de la sublimation du corps. L'absence des mains: "il ne fallait pas que les mains s'imprimassent : cela aurait donné un humanisme choquant aux compositions que je recherchais." (extrait de l'entretien de Yves Klein avec Pierre Descargues, 1960, cité dans T. Génévrier-Tausti, L'envol, p.142). L'accent mis sur le tronc, qui fait le lien entre sensualité et nouvelle réalité : "Bien sûr, tout le corps est constitué de chair, mais la masse essentielle, c'est le tronc... C'est là où se trouve l'univers réel caché par l'univers de la perception." L'impression des parties les plus intimes provoque par surprise une série d'inversion à la fois discrètes et spectaculaires. Le buste devient une tête dont les seins écartés forment des yeux, le ventre l'arête du nez, le sexe la bouche. Un visage sublimé apparait et n'appartient qu'à l'imagination de qui observe l'oeuvre.

Avec COS31 Yves Klein réalise une oeuvre rare d'une élégance manifeste qui remplit pleinement le système de réversibilité propre à l'artiste qui oscille entre charnel et spirituel.

Yves Klein entourés de roseaux réalise une Cosmogonie sur les berges du Loup, Cagnes-sur-Mer, 23 juin 1960. © Rotraut Uecker

Yves Klein et un modèle enduit de peinture à la Galerie Internationale d'Art à Paris, 9 mars 1960. © Harry Shunk