Lot 1
  • 1

Pierre-Auguste Renoir

Estimate
30,000 - 40,000 EUR
Log in to view results
bidding is closed

Description

  • Pierre-Auguste Renoir
  • LE JOUEUR DE FLÛTEAU
  • fusain sur papier
  • 62 x 47 cm ; 24 3/8 x 15 1/2 in.

Literature

Ambroise Vollard, Tableaux, Pastels & Dessins de Pierre-Auguste Renoir, Paris, 1918, vol. I, reproduit pl. IX

Condition

Executed on cream laid paper, not laid down. There are around 10 artist's pinholes mostly in the corners of the sheet. The edges are deckled. There are 5 small repaired tears, the largest measuring 4 cm, running horiziontally and vertically from the edges. Apart from some time staining around the edges, this work is in good original condition.
"In response to your inquiry, we are pleased to provide you with a general report of the condition of the property described above. Since we are not professional conservators or restorers, we urge you to consult with a restorer or conservator of your choice who will be better able to provide a detailed, professional report. Prospective buyers should inspect each lot to satisfy themselves as to condition and must understand that any statement made by Sotheby's is merely a subjective, qualified opinion. Prospective buyers should also refer to any Important Notices regarding this sale, which are printed in the Sale Catalogue.
NOTWITHSTANDING THIS REPORT OR ANY DISCUSSIONS CONCERNING A LOT, ALL LOTS ARE OFFERED AND SOLD AS IS" IN ACCORDANCE WITH THE CONDITIONS OF BUSINESS PRINTED IN THE SALE CATALOGUE."

Catalogue Note

charcoal on paper. Executed circa 1914.

 

AMBROISE VOLLARD, LE PÈRE DU MARCHÉ DE L'ART MODERNE

 

Lorsqu'en 1887, un grand et mystérieux jeune homme débarqua à Paris de l'Ile de la Réunion, lointaine colonie française de l'Océan Indien, personne n'aurait pensé qu'il allait devenir en une décennie l'une des figures les plus fascinantes et les plus emblématiques de l'art moderne. Ambroise Vollard (1866-1939) saura comme nul autre déceler les talents. Il fut non seulement à l'origine d'expositions sans précédent consacrées aux noms encore méconnus de Cézanne, Van Gogh, Gauguin et Picasso mais il fut également à l'initiative de l'édition d'estampes originales et de livres d'artistes, sa véritable passion. Les deux ventes majeures qui se tiendront chez Sotheby's à Londres et à Paris en juin prochain rendent compte de l'étendue des intérêts et de l'enthousiasme sans frein de Vollard. Toutes les œuvres mises en vente lors de ces vacations sont restées en la possession du marchand jusqu'à sa mort en 1939. Elles s'étaient jusqu'à présent dérobées aux regards, conservées dans un coffre de banque.

 

A son arrivée à Paris, Vollard ne fréquentait pas le monde de l'art et rien de son éducation ne laissait présager l'orientation qu'allait prendre sa vie, si ce n'est, comme il le raconte dans ses  , cette capacité qu'il avait, enfant, à se délecter des différentes valeurs de blancs des bouquets de fleurs sur des céramiques. Il avait commencé par étudier le droit mais les quais de Seine avec leurs lots de livres, estampes et dessins à quelques sous, ne tardèrent pas à l'en détourner. Son père aussitôt cessa de l'entretenir et Vollard devint marchand d'art, commençant par vendre de modestes dessins de Steinlen ou de Constantin Guys dans son minuscule appartement de la rue des Apennins, à l'ombre du Sacré-Cœur de Montmartre. L'instinct avisé de Vollard se révéla le jour où il convainquit la veuve de Manet de lui céder un ensemble de dessins et peintures inachevés laissés dans l'atelier à la mort du peintre. L'exposition qu'il organisa en 1894 dans sa nouvelle galerie attira entre autres artistes, les figures de Renoir et Degas dont Vollard commença également à vendre la production. Si la nouvelle galerie était petite (moins de 3 mètres de large), sa situation, rue Laffitte, était stratégique. La "rue des tableaux" comme on l'appelait alors, qui courait du boulevard des Italiens jusque sur les pentes de la colline de Montmartre, était le cœur du marché de l'art dans le Paris de la fin du XIXe siècle.

 

Quand Vollard vit pour la première fois une peinture de Cézanne, il reçut, raconte t-il, comme un "coup à l'estomac". En novembre 1895, il prit le parti, audacieux, de consacrer une exposition monographique à cet artiste plutôt oublié que méconnu. L'exposition fut une révélation tant pour les collectionneurs que pour les artistes. Elle propulsa le peintre de cinquante-six ans et le jeune marchand de vingt-neuf ans sur le devant de la scène. Parmi les nombreux artistes présents le jour du vernissage, Monet, Degas et Renoir achetèrent tous des œuvres du peintre d'Aix. En quelques années, Vollard acquit l'ensemble du fonds d'atelier de Cézanne, inaugurant en cela une pratique d'achats massifs qui se révélera être la clef de son succès. Il est significatif, semble-t-il, que Vollard ait choisi de conserver un portrait, peint assez tôt dans la carrière de Cézanne, de son ami d'enfance, l'écrivain Emile Zola duquel le peintre s'éloignera après 1886 et la publication du roman L'Oeuvre où le peintre crût se reconnaître dans Lantier, le personnage de l'artiste raté.

 

Le succès de l'exposition Cézanne permit à Vollard de s'installer au numéro 6 de la rue Laffitte, dans la galerie qui allait devenir pour les années suivantes un lieu légendaire. C'est dans la cave de la galerie que se tenaient les célèbres dîners bohèmes où le marchand recevait une myriade d'artistes et de collectionneurs en leur préparant des plats créoles. Aux antipodes du style des marchands parisiens  établis comme Durand-Ruel, Vollard était négligemment vêtu, ses expositions montées de manière aventureuse. Sa stratégie de vente elle-même était pour le moins non-conventionnelle. Gertrude Stein le décrit comme un "géant morose. C'était là le charme de Vollard. Lorsqu'il était abattu, il postait son imposante carrure contre la porte vitrée qui donnait sur la rue, les bras au dessus de la tête, les mains posées sur les montants de la porte et déversait sa morosité dans la rue. Personne ne songeait alors à essayer de rentrer".

 

Dans les années qui suivirent, Vollard organisa une série d'expositions remarquables. En 1895 et 1896, il présenta la première rétrospective des œuvres de Van Gogh. Mais, en dépit du fait que la plupart des chefs-d'œuvre de l'artiste étaient accrochés aux cimaises de la galerie, le public n'était pas préparé à une telle modernité. Et Vollard de constater amèrement : "Même les plus audacieux n'étaient pas capables de digérer sa peinture".

 

En 1898, Vollard saisit l'occasion de montrer les dernières œuvres de la période tahitienne de Gauguin dont le célèbre D'où venons-nous ? Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? (Museum of Fine arts, Boston). Un monotype, Trois Têtes Tahitiennes (lot 64), fait partie des rares et innovants monotypes par transfert de dessin que Gauguin réalisa avec le soutien de Vollard qui lui consacra, rue Laffitte, d'autres expositions.

 

En 1901, Vollard, une nouvelle fois inspiré, présenta le travail d'un jeune artiste de dix-neuf ans, alors inconnu, Pablo Picasso. L'exposition présentait de petites œuvres d'un style enlevé proche de celui-de Toulouse-Lautrec, peintes par le jeune Espagnol peu après son arrivée à Paris. Si par la suite Picasso contracta avec d'autres marchands, il resta longtemps en relation avec Vollard. En 1913, ce dernier publia des estampes aussi importantes que Le Repas frugal de 1904 (lot 69) appartenant à la Période Bleue du maître et Les Saltimbanques de 1905 (lots 66 à 68), appartenant à la Période Rose. De charmantes aquatintes destinées à l'illustration de l'ouvrage de Buffon, Histoire Naturelle (complétée en 1936 et publiée après la mort de Vollard), font notamment partie des œuvres mises en vente chez Sotheby's (lots 71 à 74).

 

En 1905, le Fauvisme explose. Vollard fut frappé par les peintures audacieuses et électriques de Derain, Vlaminck et Matisse qui firent scandale au Salon d'Automne où la critique les qualifia de "fauves". Incomprises de beaucoup, ces œuvres osées correspondaient au goût qu'avait Vollard pour la peinture forte, figurative et colorée. Aussi, ne tarda-t-il pas à acquérir la totalité de l'atelier de Derain en 1905 et celui de Vlaminck en 1906. Peint en 1905, Arbres à Collioure rompt avec l'imitation de la nature pour la capturer à travers de larges et violentes plages de couleurs vibrantes. Cette composition, une des œuvres vraisemblablement achetées à Derain en 1905, est un concentré symptomatique de la fulgurance de ce mouvement brillant et explosif que fut le Fauvisme.

 

L'une des particularités de Vollard en tant que marchand et entrepreneur, était d'encourager les artistes à expérimenter de nouveaux media. A son instigation par exemple, Derain, Vlaminck et certains autres "Fauves", réalisèrent des faïences peintes hautement originales. Mais Vollard les incitaient avant tout à pratiquer l'estampe, un medium qui le passionnait. Le marchand joua à ce titre un rôle majeur dans le renouveau de l'estampe, de la lithographie en couleurs en particulier au milieu des années 1890. En 1896 et 1898, il fut à l'initiative de deux expositions majeures et inédites des estampes des Nabis en lien avec l'édition de deux superbes albums d'estampes, L'Album des peintres-graveurs en 1896 et L'Album d'estampes originales de la galerie Vollard en 1897. "Mon idée était d'obtenir des œuvres d'artistes qui n'étaient pas seulement des graveurs professionnels" expliquait Vollard. Il voulait des artistes "peintres-graveurs" et non plus seulement des illustrateurs. Des plus innovantes et des plus sophistiquées, ces créations comptent notamment Quelques aspects de la vie parisienne de Bonnard (lot 60) et Paysages et Intérieurs de Vuillard (lot 58) dont de fraîches et belles épreuves seront mises en vente en juin.

 

La passion de Vollard pour l'estampe le conduisit à promouvoir l'œuvre graphique de quelques-uns des leaders de la génération impressionniste. Il admirait les monotypes des scènes de maisons closes de Degas dont la célèbre Fête de la patronne (lot 49). Il lui acheta directement certaines d'entre elles, d'autres lors de la vente de son atelier en 1918. Vollard passa également commande à Cézanne de quelques rares lithographies en couleurs. En 1908, il exposa de délicates pointes-sèches de Mary Cassat dont les formes fluides et linéaires révèlent l'influence de l'estampe japonaise. Quatorze d'entre elles figurent dans la vente. Vollard encouragea aussi Renoir à créer des estampes dont Le Chapeau épinglé de 1898 (lot 5 à 7) et Les Enfants jouant à la balle de 1900 (lots 3-4) sont autant d'exemples phares.

 

Vers 1910, Vollard cessa d'organiser des expositions et s'installa en tant que marchand privé dans son appartement de la rue Gramont proche de la rue Laffitte avant d'emménager, aux alentours de 1923, dans le grand hôtel particulier de la rue de Martignac dans le VIIe arrondissement. La première Guerre mondiale porta un coup d'arrêt au marché de l'art tel qu'il existait depuis la fin du XIXe siècle. Après la guerre, le centre névralgique du marché se déplaça de la rue Laffitte à la rue de la Boétie, non loin des Champs Elysées. Brassaï se souvient de la vie que menait alors Vollard dans son hôtel particulier de la rive gauche, occupant seulement un salon et une chambre et laissant les œuvres de son inestimable collection envahir le long des murs.

 

Vollard, désormais riche, ne cherchait plus à découvrir et promouvoir de nouveaux artistes. Il canalisait au contraire son argent et son énergie dans la passion qui l'excitait à la fin de sa carrière : celle qu'il vouait aux livres d'artistes et à l'édition limitée de livres de luxe. Vollard jouait un rôle actif dans la réalisation de ces livres, travaillant en étroite collaboration avec les meilleurs graveurs de l'époque et choisissant avec soin l'artiste qui conviendrait le mieux au texte qu'il avait en tête de faire illustrer. Parmi les remarquables ouvrages mis en vente, le premier livre d'artiste édité par Vollard en 1900, Parallèlement (lot 59) est particulièrement exemplaire : de manière évocatrice et sensuelle, les lithographies de Bonnard entourent comme une étreinte le texte de Verlaine. La Maison Tellier de Maupassant parue en 1934 avec des gravures de Degas d'après les monotypes des maisons closes (lot 50) et Degas, Danse, Dessin de Paul Valéry (lot 52) paru en 1936, font partie de ces publications novatrices et ô combien raffinées. Vollard édita également ses propres écrits, des textes satiriques inspirés de la figure caricaturale d'Ubu inventée par Alfred Jarry, comme Le Père Ubu à la Guerre illustré par Jean Puy et paru en 1923 (lot 137).

 

En juillet 1939, alors qu'il revenait à Paris d'un séjour passé dans sa maison de campagne de Tremblay-sur-Mauldre, Vollard trouva la mort dans un accident de voiture. La seconde Guerre mondiale éclata deux mois plus tard et la dispersion de sa collection s'opéra dans le chaos et le trouble des circonstances d'alors. Aussi, le nombre d'œuvres accumulées rue de Martignac ne fut-il jamais réellement connu : certains l'estiment à 5 000 œuvres, d'autres à 10 000. "As-tu conscience de l'ampleur de ce patrimoine, de toutes ces découvertes, de ces pièces de grande valeur, jamais passées sur le marché ni commentées, de ces trésors dormant sous des piles de toiles, surpassant toute tentative d'estimation ?" écrit Jacques-Emile Blanche. Vollard n'avait pas d'héritiers directs et son testament datait de 1911. Certaines œuvres se retrouvèrent au Canada, d'autres entrèrent en possession d'Erich Chlomovitch, un jeune Yougoslave qui fit la connaissance de Vollard dans les dernières années de sa vie. Chlomovitch emporta un grand nombre d'œuvres en Yougoslavie où il fut victime de l'Holocauste en 1942. Si la plupart de ces toiles sont aujourd'hui conservées au musée national de Belgrade, certaines ont été déposées avant son départ pour la Yougoslavie dans un coffre de banque à Paris où elles sont restées depuis. Elles portent toutes le cachet de la "Vente Chlomovitch 1981" organisée à Drouot et très vite annulée par décision de justice. Avec l'accord des ayants droit de la succession Vollard, ces trésors peuvent être aujourd'hui révélés au public et mis en vente. Les ventes aux enchères de juin chez Sotheby's sont une occasion unique de découvrir les œuvres de la collection historique d'Ambroise Vollard, un marchand et éditeur de génie qui changea le cours de l'art moderne.

Ann Dumas (traduit de l'anglais)

 

AMBROISE VOLLARD: PATRON OF THE AVANT-GARDE

 

 

When in 1887, a tall, physically imposing and enigmatic young man arrived in Paris from the Ile-de-la-Réunion, a French colony far away in the Indian Ocean, no-one could have guessed that within a decade he was to become one of the most fascinating and significant figures in the history of modern art. Ambroise Vollard(1866-1939) had an extraordinary instinct for detecting unrecognised genius. Not only was he responsible for a series of stellar exhibitions by such then unknown names as Cézanne, Van Gogh, Gauguin and Picasso, but he had a passion for original prints and for publishing the most beautiful livres d'artiste or artists' books.  Two important sales to be held at Sotheby's in London and Paris in June reveal the broad range of his enthusiasms. All of the works in the sales were in Vollard's possession until his death in 1939 and have remained unseen, locked away in bank vaults, until now.   

 

Vollard had no connections in the art world and there was little in his early life to indicate the path his life would take except, perhaps, as he recounted in his autobiography Recollections of a Picture Dealer, a precocious visual sense that led him as a child to delight in the varied whites in a bouquet of flowers of the patterns formed by fragments of blue pottery. He had come to study law but it was not long before the quais along the banks of the Seine where books, prints and drawings could be picked up for a song proved far more compelling than lectures on law, which Vollard soon abandoned altogether. His father cut off his allowance and Vollard began to deal in art, selling modest little drawings by Steinlen or Constantin Guys from his tiny attic apartment in the rue des Apennins in the shadow of the Sacre-Coeur in Montmartre.  Vollard's special flair was soon apparent when he persuaded Manet's widow to let him have a group of drawings and unfinished paintings left in the artist's studio at his death. The exhibition he put on in 1894 in his new gallery attracted such established figures as Renoir and Degas and Vollard began to trade in their works. The new space was a tiny shop, no more than ten feet wide, but its location on the rue Laffitte was crucial. The 'street of pictures', as it was called, which runs between the Boulevard des Italiens and the lower slopes of Montmartre, was at the very heart of the art world in Paris in the 1890s.

 

When Vollard first saw a painting by Cézanne, it was, he said, like 'a kick in the stomach'.  In November 1895, he took the bold step of mounting a solo exhibition by this still unrecognised artist. The exhibition was a revelation to collectors and artists alike. It put the fifty-six year-old Céanne and twenty-nine -year-old Vollard on the map. Among the many artists who attended the opening were Monet, Degas and Renoir, all of whom bought works by Cézanne. Within a few years, Vollard bought up the contents of Cézanne's studio establishing the practice of bulk buying through which he built up his vast inventory and which proved vital to his success. It is significant perhaps, that Vollard chose to keep an early portrait by Cézanne of his childhood friend, the great novelist Emile Zola, a friendship that came to an end in 1886 with the publication of Zola's novel about a failed artist, L'Oeuvre, which Cézanne saw as an indictment of himself.

                      

Profits from Cézanne show made it possible for Vollard to move to no. 6 rue Laffitte, to the gallery that over the next few years would become a legend. It was here that he held his celebrated bohemian dinners in the cellar serving his native chicken Creole to a galaxy of artists and collectors.  In contrast to the sumptuous premises of more established dealers as Durand-Ruel, Vollard's was shabby and the exhibitions haphazardly presented. Vollard's sales technique was equally unconventional. Gertrude Stein described him as 'a huge man glooming. This was Vollard cheerful. When he was really cheerless, he put his huge frame against the glass door that led to the street, his arms above his head, his hands on each upper portal and gloomed darkly in the street. Nobody thought then of trying to come in.'

 

Over the next few years, Vollard put on a sequence of astonishing exhibitions. In 1895 and 1896, he mounted the first major of shows of Van Gogh's work. Although many of Van Gogh's greatest masterpieces were presented, the public was not yet ready for it: 'The boldest were unable to stomach his painting,' Vollard later remembered.

 

Vollard seized the opportunity to show Gauguin's latest Tahitian work in 1898 with an exhibition that featured his celebrated Where do we come from? What are we? Where are we going? (Museum of Fine Arts, Boston).  Gauguin's monotype Three Tahitian Heads (lot 64 ) is a striking example of the small group of rare and inventive monotypes of transfer drawings that he made with Vollard's encouragement. Further Gauguin exhibitions followed.

 

In 1901, Vollard took a chance by showing the work of an unknown nineteen-year-old, Pablo Picasso.  The exhibition featured vibrant little pictures somewhat in the style of Toulouse-Lautrec painted shortly after Picasso arrived in Paris.  Although Picasso moved on to other dealers, Vollard continued his association with him for many years.  He published such important early prints as Le repas frugal, 1904 (lot 69) from the artist's Blue Period and Les Saltimbanques, 1905 (lots 66 to 68) from the slightly later Rose Period. Fine examples of the famous Vollard Suite, published in 1936, and the charming aquatints on animal subjects to illustrate Buffon's Histoire Naturelle, completed in 1936 but published after Vollard's death are included in the sale (lots 71 to 74). 

 

1905 saw the birth of Fauvism. Vollard was struck by the astonishingly bold and vivid paintings by Derain, Vlaminck and Matisse that caused such a stir at the Salon d'Automne where they were dismissed as 'fauves' or wild beasts. Although misunderstood by many, these daring works appealed to Vollard's taste for strong, figurative and colourful painting and he lost no time in buying up the entire studios of Derain in 1905 and Vlaminck and 1906, both young artists with no reputation.   Derain's electric Arbres à Collioure is no mere imitation of nature but a heightened response to the natural world captured in flat patterns of dazzling colour.  This spectacular composition, which was almost certainly among the works that Vollard acquired from the artist in 1905, encapsulates the daring sprit of the brilliant and short-lived new style that was Fauvism. 

 

 

 

One of Vollard's strengths as a dealer and patron was to encourage to artists to experiment with new materials. At his urging, for example, Derain, Vlaminck and some of the other Fauve artists produced highly original painted ceramics. But above all, Vollard pushed his artists to make prints, a medium that he loved. Vollard played a key role in the rebirth of printmaking, particularly the emergence of the colour lithograph in the 1890s. He staged two major and innovative exhibitions of prints by the Nabi artists in 1896 and 1898 that were linked to his two first publishing ventures, the two important albums, Album des peintres-graveurs, 1896 and Album d'estampes originales de la Galerie Vollard, 1897. 'My idea was to obtain works by artists who were not printmakers by profession,' Vollard explained. He wanted artists 'peintres-graveurs' (painter-printmakers) and not mere illustrators. The result was some of the most innovative and sophisticated suites of colour lithographs ever made, including Bonnard's Quleques aspects de la vie de Paris (lot 60) and Vuillard's  Paysages et Intérieurs (lot 58), fine impressions of which  will be presented in the forthcoming sales (Bonnard, Paris le soir and Vuillard La Cuisinière).

 

Vollard's passion for prints led him to promote the graphic work of some of the blue-chip Impressionist generation.  He admired Degas's risqué brothel monotypes that included the celebrated La Fête de la patronne (lot 49) and acquired a number of them from Degas directly and at his posthumous sale in 1918. He commissioned rare colour lithographs from Cézanne and in 1908 showed a substantial number of Mary Cassat's strikingly beautiful drypoints which, in their spare linearity, are indebted to Japanese prints (lots 32 to 46). No less than fourteen of them will be coming up for sale in Paris. Vollard encouraged Renoir to venture into making original prints including one of his most famous compositions, Le Chapeau epinglé, 1898 (lots 5 to 7), and Les Enfants jouant à lla balle, 1900 (lots 3-4).

 

 

By around 1910 Vollard ceased staging exhibitions and thereafter acted as a private dealer first in his apartment in the rue de Gramont, near the rue Laffitte, and from around 1923 in the twenty-six-room mansion he had bought in the rue de Martignac in the fashionable seventh arrondissement. The First World War had brought to an end the art market as it has existed since the late nineteenth century. After the war its geographical focus shifted from the rue Laffitte to the rue de la Boétie off the Champs-Elysées. The photographer Brassaï recalled Vollard's modest life in these surrounding, occupying only the dining room and the bedroom, leaving his vast collection of priceless works of art accumulated over decades stacked up against the walls.

 

By now, Vollard was wealthy.  He was no longer interested in discovering and promoting new artists. Instead he channelled his money and energy into the consuming passion of his later career – livres d'artiste or beautifully produced limited edition artists' books.  Vollard took an active role in the production of these books, working closely with master printers and selecting with great care the artist who would best suit the text he had in mind. Among the outstanding publications in the sale is Vollard's first livre d'artiste,  Paul Verlaine's Parallelement, 1900 (lot 59), in which Bonnard's lithographs seem to float evocatively around the text. Later books include Guy de Maupassant's, La Maison Tellier, 1934 (lot 50), illustrated with engravings after Degas's brothel monotypes, and Paul Valéry's Degas, Danse, Dessin, 1936 (lot 52). Vollard also published his own texts, satirical writings, based on Alfred Jarry's caricature figure Ubu, such as  Le Père Ubu à la Guerre illustrated by Jean Puy, 1923 (lot 137).

 

Vollard was killed in a car crash in July 1939 on his way back to Paris from his country house at Tremblay-sur-Mauldre. World War II broke out two months later and the dispersal of his collection was caught up in the chaos of wartime circumstances.  The numbers of work piled up in the rue Martignac has never been known : some estimated it at 5,000 and others as many as 10,000.  'Are you aware of the enormity of the estate, discoveries everywhere, valuable things, never sold nor noted, discoveries under piles of canvases, priceless, surpassing all calculation,' wrote Jacques-Emile Blanche. Vollard had no direct heirs and the last will he made was dated 1911. Some of the works went to Canada, others passed into the possession of Erich Slomovic, a young Yugoslav and associate of Vollard at the end of his life. Slomovic took a large number of the works to Yugoslavia where, in 1942, he was a victim of the Holocaust. Most of these works are now in the National Museum in Belgrade. Before leaving Paris, he had deposited the remainder of his holdings with the Société Générale bank where they have remained. Agreements with the Vollard heirs have now made it possible for the works left in Paris to be offered for sale. The June sales offer a chance to discover a collection that encapsulates the rich and varied achievements of Ambroise Vollard, a dealer and publisher of genius who changed the course of modern art.

Ann Dumas

 

 

GLOSSAIRE

 

Aciérage de la planche: Opération électrolytique qui consiste à recouvrir d'acier une plaque de cuivre afin de rendre la gravure plus résistante. Cette technique est spécialement utilisée pour les barbes de la pointe sèche qui peuvent s'user ou s'affaisser.

 

Aquatinte : Procédé d'eau-forte par lequel on obtient différentes tonalités par la morsure, plus ou moins prolongée, dans un bassin d'acide, d'une plaque de métal recouverte d'une couche de résine ou de bitume en poudre. L'acide attaque la plaque dans les zones que les grains de résine fondus n'ont pas occultés. L'aquatinte permet d'obtenir des surfaces de gris à noir suivant le temps de morsure et la densité de résine déposée.

 

Barbe : Copeau que l'outil du graveur lève dans la planche de métal de chaque côté de la taille. Ces barbes retiendront plus ou moins d'encre donnant à l'impression un trait particulier allant de la finesse extrême au noir profond et velouté. La fragilité des barbes rend l'impression d'une pointe-sèche délicate et ne permet qu'un nombre limité de tirage.  

 

Eau-Forte : Procédé de gravure en creux intaglio qui s'obtient grâce à une réaction chimique. La plaque de métal est d'abord recouverte d'un vernis ou d'une résine. On peut alors librement exécuter un dessin sur la plaque, enlevant ainsi la couche de vernis à certains endroits. La plaque est alors placée dans un bain d'acide qui, par réaction chimique, creuse le métal. On parle alors de morsure. Lorsque la plaque est nettoyée de son vernis, elle est prête à recevoir l'encre, les autres étapes de l'impression se faisant de la même manière que pour les autres techniques de l'intaglio.

 

État : Épreuve tirée par le graveur à différents stades de son travail pour en évaluer la progression.

 

Filigrane : Dessin imprimé dans la pâte du papier par le réseau de la forme et qui peut se voir par transparence. Le nom du fabricant, la marque, voire la date de fabrication du papier sont souvent indiqués en filigrane.

 

Lithographie : Technique d'impression à plat ou sur une plaque de zinc où une pierre calcaire grainée et traitée avec un mordant. L'artiste dessine avec un crayon ou des encres grasses. Après avoir mouillé la pierre, l'imprimeur en lithographie applique l'encre au rouleau qui se fixe sur les parties grasses puis presse une feuille de papier.

 

Monotype : Technique de peinture ou d'impression à l'encre sur plaque de métal, qui permet d'obtenir une épreuve unique.

 

Pointe-sèche : Technique où le métal est attaqué directement par une pointe d'acier très affûtée (pointe-sèche) et uniquement à la force du poignet. Les sillons déchirent le cuivre en provoquant sur ses bords un retournement du métal dit barbe. A l'encrage, celle-ci sera gorgée d'encre et donnera des noirs très veloutés.

 

Cuvette : Empreinte laissée par la forme de la plaque de métal sur le papier.

 

Tirage : Ensemble des exemplaires imprimés à partir d'une planche unique.

 

Vernis-mou : Technique par laquelle sur une plaque vernie, le graveur applique une feuille de papier grené. Sous la pression le papier adhère au vernis. La feuille retirée, toutes les parties pressées découvrent le métal. Ces parties seront mordues par l'acide. A l'impression, l'effet a l'apparence d'un dessin au crayon gras avec les qualités de la gravure.

BIBLIOGRAPHIE

Brigitte Baer et Bernhard Geiser, Picasso : Peintre-Graveur, Berne, 1990-1992
Georges Bloch, Pablo Picasso : Catalogue de L'Œuvre Gravé et Lithographié, Berne, 1998
Francis Bouvet, Bonnard : The Complete Graphic Work, London and Paris, 1981
Adelyn D. Breeskin, Mary Cassatt : A Catalogue Raisonné of the Graphic Work, New York, 1979
Pierre Cailler, Catalogue Raisonné de L'Œuvre Gravé et Lithographié de Maurice Denis, Geneva, 1968
François Chapon et Isabelle Rouault, Rouault : Œuvre Gravé, Monte Carlo, 1978
Jean Cherpin, L'Œuvre Gravé de Cézanne, Marseille, 1972
Loys Deteil, Le Peintre-Graveur Illustré : Tome Dix-Septième, Paris, 1923
Loys Delteil, Renoir : L'Œuvre Gravé et Lithographié : Catalogue Raisonné, San Francisco, 1999
Douglas Druick, Cézanne, Vollard and Lithography, Canada, 1972
Alicia Craig Faxon, Jean-Louis Forain : A Catalogue Raisonné of the Prints, New York, 1982
Germain Hédiard, Fantin-Latour : Catalogue de L'Œuvre Lithographie du Maître, Paris, 1906
Una E. Johnson, Ambroise Vollard Editeur : Prints, Books, Bronzes, New York, 1977
E.W. Kornfeld et P.A. Wick, Catalogue Raisonné de l'Œuvre Gravé et Lithographié de Paul Signac, Berne, 1974
André Mellerio, Odilon Redon, New York, 1968
Claude Roger-Marx, L'Œuvre Gravé de Vuillard, Monte Carlo, 1948

 

VOLLARD & RENOIR

 

Pierre-Auguste Renoir, Claude Monet, Edgar Degas, Camille Pissarro, soutenus alors par Paul Durand-Ruel, ont tous visité l'exposition d'aquarelles de Manet par laquelle Ambroise Vollard inaugura sa première galerie parisienne, rue Laffitte, en 1894 . "Vollard se tient à distance, à cette époque, des néo-impressionnistes, qui ont leur fief à quelques pas de là, au 20 rue Laffitte, boutique ouverte en décembre 1893 et gérée par Lucien Moline. Il semble avoir eu clairement l'intention, dès ses débuts, d'asseoir sa réputation sur une génération qui a fini par s'imposer, celle de Manet et des impressionnistes historiques. A des degrés divers, chacun d'entre eux aida par la suite Vollard à identifier les artistes qu'il devait acheter, firent des achats eux-mêmes et amenèrent d'importants collectionneurs à son magasin" (Anne Distel). Parmi ces peintres, Renoir est celui qui entretiendra les relations les plus nourries et les plus longues avec Vollard.

Prétextant vouloir identifier le modèle d'un portrait de Manet qu'il possédait, Vollard voulut solliciter Renoir, installé avec sa famille à Montmartre. Jean Renoir évoquera ainsi la première visite de Vollard à son père, au début de l'année 1894 : "Un grand bonhomme maigre, avec une petite barbe, m'appela par-dessus la clôture. Il voulait parler au patron [c'est-à-dire Renoir]. Ses vêtements étaient plutôt râpés. Son visage très brun et le blanc de ses yeux lui donnaient l'air d'un camp-volant [d'un bohémien], en tout cas d'un sauvage. J'ai cru que c'était un marchand de tapis et je lui dis qu'on avait besoin de rien. A ce moment la patronne est venue et l'a fait entrer. Il avait dit qu'il venait de la part de Berthe Morisot. Il faisait tellement pitié que la patronne lui a offert de la tarte aux raisins et une tasse de café. Après cela, le patron est descendu" (Jean Renoir, Pierre-Auguste Renoir mon père, Paris, Gallimard, 1981, p. 337).

Le peintre, alors âgé de 53 ans, personnalité respectée et très en vue, dont la carrière culmine en 1892 lorsque l'Etat lui achète Jeunes femmes au piano (Paris, musée d'Orsay), se prend immédiatement de sympathie pour le jeune marchand. Il lui achète deux aquarelles lors de son exposition Manet et l'aide à contacter Cézanne pour la grande exposition que Vollard prépare l'année suivante. Il devient vite un des artistes de la galerie Vollard en confiant au marchand d'abord de nombreuses toiles de petits formats, les œuvres majeures étant  réservées à Paul Durand-Ruel. Parallèlement, Vollard encourage Renoir à participer au formidable essor de l'estampe originale. "En le poussant notamment à réaliser plusieurs lithographies en noir et en couleurs, Vollard lui fait expérimenter un moyen d'expression où, assisté par des praticiens remarquables (Clot par exemple), Renoir peut exprimer sa sensibilité ; Le Chapeau épinglé, de 1898, deviendra une composition célèbre de l'artiste" (Anne Distel). A partir de 1900, Vollard vend des Renoir plus importants et plus régulièrement. C'est également Vollard qui initie Renoir à ses premiers essais de sculpture en lui procurant des praticiens émérites comme Richard Guino. Le vieux peintre peindra trois admirables portraits du marchand, en 1899, 1908 et en 1917. Cette même année, il offre à Vollard un autoportrait crépusculaire et bouleversant, qu'il dédicace avec une tendresse complice "à Ambroise Vollard, mon raseur sympathique" (lot 13).