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Jean-Louis-André-Théodore Gericault
Description
- Jean-Louis-André-Théodore Gericault
- Etude pour la 'Scène de déluge' (recto);Un homme à cheval tenant une lance est attaqué par un homme à pied armé d'une épée (verso)
- Encre brune sur papier
- 21,2 x 13,6 cm ; 8 1/3 by 5 1/3 in.
Provenance
Catalogue des tableaux anciens & modernes, aquarelles & dessins, lithographies, eaux-fortes, estampes et livres à figures composant le cabinet de feu le colonel de La Combe, 2-6 février 1863, no. 168;
Catalogue des tableaux anciens et modernes [...] composant la collection Mame, de Tours, Paris, Galerie Georges Petit, 26-29 avril 1904, no. 103.
Literature
G. Bazin, Théodore Géricault. Étude critique, documents et catalogue raisonné, t. III, Paris, Bibliothèque des Arts, 1989, reproduction d'un calque d'Alexandre Colin d'après notre dessin p. 227, no. 926.
Condition
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Catalogue Note
Avec raison, Germain Bazin met en rapport le recto de notre dessin avec le célèbre tableau de Géricault, Scène de déluge, au musée du Louvre depuis 1950 (voir l'illustration p. 79). Ce tableau, d'importance majeure dans le corpus géricaldien, a donné lieu à plusieurs datations par les spécialistes de l'artiste, allant de 1816 à 1818. Eitner et Bazin ont conclu que cette Scène de déluge datait probablement des années 1815-16, en tout état de cause avant le départ de Géricault pour l'Italie à l'automne 1816.
Peinte à une époque de grand trouble, cette image de catastrophe naturelle, inspirée du Déluge de Poussin (Musée du Louvre), pourrait être rapprochée des grands désastres politiques et militaires qui secouèrent la France et l'Europe. La Scène de déluge serait ainsi, bien avant le Radeau de la Méduse (Salon de 1819), un véritable tableau allégorique.
D'un point de vue purement stylistique, notre dessin présente toutes les caractéristiques de certains dessins à la plume et encre brune de Théodore Géricault. La manière vigoureuse avec laquelle notre Étude pour la 'Scène de déluge' est dessinée, le rendu des musculatures puissantes et exagérées des trois personnages s'accrochant à un cheval, peuvent-être qualifiés « d'antique » où plus exactement de « manière à la Michel-Ange ». Notre dessin peut être également rapproché de plusieurs dessins de Géricault des années 1815-16 qui sont en rapport direct avec la Scène de déluge. Deux d'entre eux sont conservés au Musée des Beaux-Arts de Rouen, un autre au Musée des Beaux-Arts d'Angers (voir Bazin, t. III, 1989, pp. 227-9, nos. 927, 928, 929, 930 et 932).
Notre étude présente également de grandes similitudes iconographiques avec le dessin de la collection Muriel Butkin, copie fragmentaire d'après le Déluge de Poussin, représentant un homme accroché désespérément à la crinière d'un cheval.
Le verso de notre dessin, Un homme à cheval tenant une lance est attaqué par un homme à pied armé d'une épée, est totalement inédit et semble être contemporain du recto. La position du cheval et la présence d'une peau de panthère en guise de selle évoquent immanquablement le Portrait équestre de M. D.***, le grand succès du jeune Géricault exposé au Salon de 1812 (Paris, Musée du Louvre). Cette vigoureuse étude à la plume n'est certainement pas un dessin préparatoire pour le grand tableau de 1812 mais plutôt une réinterprétation « à l'antique », avec de nombreuses variantes, effectuée quelques années plus tard. Le style et le système des hachures sont, là encore, totalement michelangelesques et se retrouvent dans plusieurs dessins de la même période conservés au Musée Bonnat à Bayonne, en particulier un Croquis d'hommes au travail (voir Bazin, t. III, 1989, pp. 162-3, nos. 763, 764 et 765).
De ces fameuses hachures, Bazin écrivait en 1987:
« C'est sans doute en Italie que Géricault inaugure une façon de dessiner à la plume en 'manière de gravure', au moyen de hachures entrecroisées devenant courbes dans les rondeurs, qu'il a employée plusieurs fois pour modeler une forme nue. Ce procédé a été mis au point par Dürer, qui était avant tout un graveur. Néanmoins, quoique les gravures de Dürer aient été facilement accessibles à un artiste qui travaillait au Cabinet des estampes, on serait plutôt tenté de croire que Géricault a emprunté ce procédé à Michel-Ange, qui l'a aussi employé fréquemment. Plusieurs de ces dessins de Michel-Ange ou michelangelesques sont au Louvre et l'un d'eux, le fameux prétendu Faune est très proche de Géricault. Celui-ci aurait pu voir cette œuvre puisqu'elle a été acquise par le Cabinet du Roi en 1775 ».
Contrairement à l'opinion émise par Bazin, on sait que Géricault utilisa cette écriture au moyen de hachures bien avant son périple italien de 1816-17. On peut même avancer que cette façon de camper un dessin à la plume est une caractéristique majeure de l'art de dessiner de Théodore Géricault.