Lot 9
  • 9

Pierre Soulages

Estimate
600,000 - 800,000 EUR
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Description

  • Pierre Soulages
  • Peinture 195 x 130 cm, 27 février 1954
  • signé et daté ; signé, titré et daté deux fois au dos, sur la toile et le châssis
  • huile sur toile
  • 196,3 x 132 cm ; 77 1/4 x 51 15/16 in.
  • Exécuté le 27 février 1954.

Provenance

Kootz Gallery, New York
Collection Janet Berkowitz, New York
Galerie Applicat-Prazan, Paris
Collection particulière, Paris

Exhibited

New York, Kootz Gallery, Soulages, 1954 ; catalogue
Chicago, Arts Club, Mathieu-Soulages, 1954 ; catalogue, no.8
San Francisco, San Francisco Museum of Art, Art in the 20th century, (commémoration du 10ème anniversaire des Nations Unis) ; catalogue
Pittsburgh, Carnegie Institute, Pittsbugh International Exhibition, 1955
Paris, Galerie de France, Soulages, 1956 ; catalogue, no. 6
Hanovre, Kestner-Gesellschaft, Pierre Soulages, 1960-1961 ; itinérante à Essen, Folkwang ; La Haye, Gemeente ; Zurich, Kunsthaus

Literature

Pierre Encrevé, L'Oeuvre Complet Peintures, I. 1946-1959, Paris, 1994, pp.161-186, illustré en noir et blanc et en couleurs
Pierre Encrevé et Alfred Pacquement, catalogue de l'exposition Soulages, Centre Pompidou - Musée National d'Art Moderne, 2009-2010, pp.306-308, illustré

Condition

The work is in very good condition. The canvas is not relined. There are some stabilized craquelures throughout, mostly visible in the thick black paint (these craquelures have been stabilized which appear under UV light). Under UV light, there are a few retouching to the upper left corner and to the lower right corner. There is a 1 cm line of retouching in the white squared surface in the lower right quadrant. There is an aerea which fluoresce at the upper right quadrant. Colours: The illustration in the catalogue does not convey the beautiful transparencies and shades of the different paint layers.
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Catalogue Note

signed and dated ; signed, titled and dated twice on the back, on canvas and stretcher ; oil on canvas. Executed on the 27th of February 1954.

Giant Steps

Pierre Soulages a 34 ans quand à la fin du mois de janvier 1954, Samuel Kootz lui écrit pour l'inviter à réaliser dans sa galerie une exposition personnelle de ses œuvres. La Kootz Gallery occupait alors à New York une place de premier ordre en matière d'art contemporain. Elle était particulièrement reconnue « pour son dynamisme et pour le lien qu'elle y établissait entre des maîtres confirmés de la peinture parisienne (Picasso, Léger, Arp, Braque, Miro) et de jeunes peintres américains (Hans Hofmann, Robert Motherwell, ...)... »(1). Le mois suivant, « dès le 15 février 1954, le contrat fut signé et la première exposition de Soulages chez Kootz eut lieu du 26 avril au 15 mai 1954, avec un texte d'introduction au catalogue rédigé par Bernard Dorival, alors conservateur au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris »(2). Dans ce contexte stimulant, Pierre Soulages réalise Peinture 195 x 130 cm, 27 février 1954 qu'il envoie à New York avec neuf autres peintures et des gouaches. Cette exposition chez Samuel Kootz sera déterminante pour l'artiste. « Ainsi dès 1954, après l'Allemagne et le Danemark, Pierre Soulages rencontre aux Etats-Unis une audience qu'il n'a pas encore en France »(3).

Tenant à réussir sa première exposition à New York, Pierre Soulages déroge à la demande de Samuel Kootz en lui envoyant des toiles de dimensions supérieures à ce que le galeriste attendait. Ainsi choisit-il dans Peinture 195 x 130 cm, 27 février 1954, le plus grand format de toile offert dans le commerce, renforçant l'aspect monumental et grandiose de l'œuvre.  Ce que recherche Soulages dans les grands formats est l'expérience qu'ils font vivre au spectateur « leur grande dimension peut amener à se déplacer devant eux, à appréhender la toile par pans successifs, à faire vivre l'alternance des clairs et des sombres, des lumières et des silences ».(3bis).

La composition du tableau s'inscrit ainsi dans la lignée des œuvres de Pierre Soulages dans lesquelles le classicisme s'impose. Les traces noires épaisses et caractéristiques assurent à Peinture 195 x 130 cm, 27 février 1954 une reconnaissance immédiate, passant pour la marque même du style de l'artiste. « Un fil court pourtant, tout au long, qui traduit la permanence de certains choix fondamentaux et sans doute largement inconscients, qu'on repère par les liens ... avec la peinture sur papier ... »(4). Le thème que développe Pierre Soulages dans Peinture 195 x 130 cm, 27 février 1954 avait déjà été expérimenté en 1953, à la gouache sur papier dans des dimensions plus modestes ; l'artiste l'utilisera également en 1957 pour réaliser Eau-forte VIII, 1957 pour la Galerie Berggruen à Paris. Pierre Soulages aura déployé ce thème si puissant dans ses trois techniques de prédilections : la gouache, la gravure et la peinture à l'huile de grand-format.

A la manière d'un artisan, Pierre Soulages fabrique un arsenal d'outils de toutes dimensions pour mieux manier la peinture. Ainsi se révèlent des empâtements les scintillements de la lumière et des étirements de la matière des transparences inattendues. Des formes sombres, axées verticalement que coupent brutalement de soudaines horizontales, tendues par un dynamisme interne, se détachent du fond nu de la toile où surgit une déclinaison de verts aux nuances infinies. « Des syncopes, partout, et la volonté d'interrompre le déroulement du discours peint. Le triomphe, en un mot, de tout ce qui est propre à paralyser les éléments du tableau en une immobilité si totale qu'on a parlé à ce sujet de hiératisme, et si grandiose qu'on a fréquemment comparé ces tableaux à des architectures. »(5)

Œuvre historique, pionnière aux Etats-Unis, Peinture 195 x 130 cm, 27 février 1954 illustre dans un grand format le savoir-faire virtuose de Pierre Soulages avec lequel, rétrospectivement, il a relevé « un souverain et calme défi au passage du temps »(6).

(1). Serge Guilbaut, Comment New York vola l'idée d'art moderne, ed. Jacqueline Chambon 1988, p. 162
(2). Serge Guilbaut, Pierre Soulages : l'Américain à Paris, in catalogue Soulages, Centre Pompidou/Musée National d'Art Moderne, 2009-2010, p.43
(3). Pierre Encrevé, L'Œuvre Complet Peintures, I. 1946-1959, Seuil 1994, p.160
(3b). Pierre Soulages cité par Pierre Daix in Pierre Soulages, Ides et calendes, 2003, p.50
(4). Pierre Encrevé, L'Œuvre Complet Peintures, I. 1946-1959, Seuil 1994, p.168
(5). Bernard Dorival, in catalogue Soulages, Musée National d'Art Moderne – Paris, 1967
(6). Annie Claustres, Le geste contré ou la linéarité brisée : peintures, 1947-1957, in catalogue Soulages, Centre Pompidou/Musée National d'Art Moderne, 2009-2010, p.75

Peinture 195 x 130 cm, 27 février 1954 dans l'exposition Pierre Soulages, Galerie de France, Paris, 1956. © Archives Soulages/ADAGP, Paris, 2009

Pierre Soulages dans son atelier, rue Schoelcher à Paris, posant en 1954 avec Peinture 195 x 130 cm, 27 février 1954. © Denise Collomb