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Superbe cimier, Idoma du nord de la Cross River , Nigeria
Description
- Superbe cimier, Idoma du nord de la Cross River
- haut. 31 cm
- 12 1/4 in
Provenance
Catalogue Note
Ce superbe cimier se distingue à la fois par la monumentalité de sa plastique, par l’extrême rareté de sa représentation, et par les éléments constitutifs de son iconographie, restituant une part de l’histoire complexe des Idoma méridionaux.
Parmi la mosaïque d’ethnies regroupées sous le nom d’Idoma, plusieurs groupes méridionaux (Akewa, Yatche et Iyala) eurent, à un moment de leur histoire, une relation historique et culturelle avec les hommes de la Moyenne Cross River. De surcroît, ils ont su assimiler et traduire, sous des formes originales, le style et les symboles qui prévalaient parmi les peuples qu’ils côtoyaient sur les rivages de la Cross River. Ce masque retrace superbement cette mosaïque culturelle constituée à travers l’histoire de la région : visage blanc, dont l’origine vient des Akewa avant sa diffusion dans toute la région, à partir du XIXe siècle (Neyt (1985 : 116), chevrons noirs, blancs et rouges des ignames évoquant les peintures corporelles des Jukun (Meek, 1931 : 20, 21 et 125), coiffure en nodules fins, portée au nord et au sud de la Benue, chéloïdes temporales diffusées dans tout le pays Idoma, marque dite « en cible » à l’arrière de la tempe, propres en particulier aux Ekoï et aux Efik (Talbot, 1912) et enfin les nodosités entourant chaque œil, observées par Meek chez les Tiv au début des années 1920 (1925 : 47). Les Idoma du Sud furent au contact de tous ces peuples ou de leurs civilisations.
A la différence des Idoma de la Benue, les Idoma méridionaux ont, comme les Boki, les Mbembe, et autres groupes de la Cross River, pratiqué la chasse aux têtes, établi des sociétés régulatrices, festives ou corporatives, dont les cimiers représentaient symboliquement les fonctions (cimiers ekutakpa apparaissant au moment des moissons, surmontés d’un enfant, cimiers ungulali surmontés d’oiseaux, etc.).
Le Dr Sidney Kasfir (1984: 163-193) a souligné l’importance hautement symbolique de l’igname dans les rites culturels des Idoma méridionaux. Les fêtes des ignames (lors de la plantation et de la récolte) étaient l’occasion de danses de masques qu’exécutaient, en particulier chez les Akweya, des troupes de danseurs regroupés dans une guilde particulière. La déesse de la terre Aje était associée à ces cérémonies de réjouissance et d’invocations. Malgré l’absence d’information recueillie lors de sa collecte, il ne fait aucun doute que le cimier présenté ici évoque l’élément nourricier primordial que constitue l’igname chez les Idoma méridionaux, et qu’il devait vraisemblablement être porté lors de ces festivités annuelles.
Enfin, l’ampleur des formes, le développement des lignes, la vigueur du trait et surtout le traitement magistral des trois symboles sculptés à l’arrière de la tête confèrent à cette tête-cimier une superbe monumentalité qui, conjuguée à l’équilibre parfait des traits du visage et à la finesse de leur modelé, en fait l’un des chefs d’œuvre de la sculpture Idoma.