

Après avoir consacré les débuts de sa carrière à la conception de compositions que l’on pourrait qualifier de graphiques, figuratives et s’affiliant à une esthétique surréaliste, On Kawara s’oriente à partir des années soixante vers une œuvre biographique s’inscrivant dans le temps et l’espace. Après avoir quitté le Japon pour s’installer à New York en 1959, où il s’intéresse de plus en plus à la relation qu’entretiennent langage et matérialité plastique, On Kawara mettra plusieurs années avant de poser le jalon de ce pour quoi il passera à la postérité : les Date Paintings.
Dès la toute première toile de cette série initiée le 4 janvier 1966 et qui l’occupera jusqu’à son dernier souffle, On Kawara élabore le rigoureux protocole qu’il déclinera dès lors de manière obsessionnelle pendant près de cinquante ans : peindre un monochrome de couleur sombre au centre duquel se dessine dans un blanc immaculé la date du jour de réalisation de l’œuvre dans la langue officielle du pays où il se trouve. Chaque toile est accompagnée d’une boîte en carton dans laquelle se trouve une coupure de presse qui informe du lieu et de sa date de réalisation.
Essentiels à la compréhension du travail d’On Kawara, le choix du procédé et du processus, immuables et pouvant être considérés comme de véritables rituels, reflètent une ambition unique dans l’histoire de l’art : établir une relation objective au monde à travers l’expérience que nous ont en font.
Les deux œuvres qui nous occupent ici, 21.11.1991 et 21.11.1991, réalisées le même jour, ont été rigoureusement peintes à la main par l’artiste appliquant à la surface de la toile de multiples couches blanches, puis foncées, pour qu’aucune trace de pinceau ne soit visible de ces deux compositions. Dans ce projet fastidieux, ce sont ainsi les infimes variations de détail et l’ampleur visuelle déterminée par accumulation qui distingue chacune de ces œuvres d’un simple comptage mécanique, autodestructeur et imperceptible du temps. Par là, On Kawara accomplit une œuvre à la dimension monumentale et universelle qui s’établit dans la durée et ne se livre pourtant que de façon fragmentaire, à travers des œuvres comme 21.11.1991 et 21.11.1991.