"Dessiner, c’est prendre possession du monde et, très directement, des femmes aimées […]. Il faut garder à l’esprit ce rôle exploratoire pour saisir la portée des œuvres dessinées appartenant aux six dernières années de travail de l’artiste […]. Il s’y donna entièrement, je veux dire, sans peindre. Or, s’il récapitule son monde imaginaire, jeunes filles à prendre, toutes plus affriolantes les unes que les autres, duègnes, mousquetaires du temps des Ménines, au-delà de l’humour, de la distanciation, comment ne pas lire l’engagement total : chaque dessin est la minute de vérité."
Pierre Daix (“Des dessins pour tout dire”, in Picasso. Gouaches, Lavis et dessins 1966-1972, Paris, 1981)
"Matisse en mourant, m’a légué ses odalisques” confiera Picasso à Roland Penrose après la mort du maître (Roland Penrose, Picasso, Paris, Flammarion, 1982, p. 159). C’est dire l'importance qu'il accordait à cette série d'œuvres peintes à Nice dans les années vingt. Matisse, reprenant une tradition de la peinture du XIXème siècle, magistralement interprétée par Ingres et Delacroix, parvient parfaitement à intégrer le corps nu modelé et ombré dans un décor ornemental qui affirme la planéité du tableau. Dans Nu assis sur un coussin, au-delà du sujet, c’est la pureté du trait qui rappelle non seulement Matisse mais également les œuvres classiques de Picasso dans les années 1920. L’artiste donne ici l’une de ses multiples interprétations de son thème de prédilection : le nu féminin. A travers cette figure sensuelle aux formes sculpturales dans un intérieur orientaliste, Nu assis sur un coussin démontre comment Picasso, alors au crépuscule de sa vie, a su garder intact son sens de l’érotisme et sa virtuosité technique.