

Habitué aux peintures d’enfants de la bourgeoisie, il laissa néanmoins quelques portraits de l’aristocratie. La Famille Leroy (musée Pouchkine) représente bien le conseil d’une riche famille, fédérée pour un instant autour d’un prêtre. Notre peinture montre, quant à elle, la famille princière d’Orléans. Les personnages sont de qualité, mais la douceur qui baigne l’ensemble par ce « ton argentin, cette touche savante » ainsi que le décrivait les critiques de son art[3] est exactement la même que celle qui irradiait déjà le lever banal d’une jeune servante dans Le lever de Fanchon[4].
Un même goût de la simplicité se lit dans l’émotion ordinaire d’un parent – le duc d’Orléans (1747-1793) – soulevant le rideau pour vérifier le sommeil de son jeune bébé. Le nouveau-né n’a que quelques mois, puisque Louis-Philippe, était né en octobre 1773 et notre toile est datée par le peintre de l’année suivante. Certainement effectuée au Palais-Royal, où Louis-Philippe était né, le tableau semble être une rare preuve des premiers mois du futur Roi. Lépicié ne s’éloignait jamais de son quartier, et pourquoi l’aurait-il fait puisque son voisinage lui prêtait l’observation des plus modestes scènes quotidiennes, comme des naissances des nouveaux gouvernants.
La composition du tableau avait dû être un émerveillement pour Lépicié. Ainsi ne se priva-t-il pas de détailler les riches fauteuils aux palmettes de passementerie, le lit doré avec ses frises de postes et ses velours cramoisis, les soies vertes bordant le bébé au teint de porcelaine et enfin les dentelles traitées dans un magnifique jeu de transparence par à-coups minutieux. Le portrait du jeune serviteur noir, surnommé Scipion, semble également avoir séduit le peintre qui attira l’attention sur ce profil exotique, en lui faisant tenir dans les mains un chat hérissé, qu’il détourne pour protéger le nouveau-né.
[1] Philippe Gaston-Dreyfus, Nicolas Bernard Lépicié (1735-1784), Librairie Armand Colin, Paris, 1923, p. 20.
[2] op. cit., p.19.
[3] L’année littéraire, 1773, cité par Gaston-Dreyfus, p. 21
[4] Le Lever de la jeune fille ou « lever de Fanchon », Musée de l’hôtel Sandelin, Saint-Omer et actuellement visible au musée Marmottan
« He was a painter of nature and everything he did was imbued with the truth » wrote an anonymous critic about the art of Nicolas Bernard Lépicié (1735-1784), during the Salon of 1785.
Nicolas Bernard Lépicié is often considered as one of the most sensitive observers of his time. Although he had dreamed of becoming a history painter, his contemporaries thought him more talented as a genre painter. His father was an académicien and his mother engraved works by Chardin. Although he usually painted the children of the bourgeoisie, a painting in the Pushkin Museum does represent an aristocratic family gathered around a priest.
Our painting shows the future royals, the Orléans family. Despite the exceptional status of the sitters, Lépicié has not altered his style here. He depicts the family with the same tenderness used, for example, in illustrating the rousing of a servant in his work The Awakening of Fanchon (Musée de l’Hôtel Sandelin, Saint-Omer). In the present work, the duc d’Orléans (1747-1793) lifts up a curtain to watch his young baby, the future King Louis-Philippe, sleeping. As Louis-Philippe was born in October 1773 and our painting is dated 1774, this work would appear to be a unique testimony to future king of the Palais-Royal’s first months. The composition is lavished with a wealth of detail, emphasising the rich velvet of the chairs or the curtains surrounding the baby. Lépicié seems to also have spent time over the portait of the young black servant Scipion, whose exotic profile is painted with care.