PF1303

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Lot 1
  • 1

Barnave, Antoine

Estimate
10,000 - 15,000 EUR
bidding is closed

Description

  • Barnave, Antoine
  • 76 lettres autographes d'Antoine Barnave et de sa mère à Louis Michel Rigaud de L’Isle. Saint Robert, Vercheny, Grenoble, Versailles, Paris, 29 novembre 1781-30 juin 1790.

Provenance

Descendance familiale de Louis Michel Rigaud de L’Isle, élu député de la noblesse mais déclina tout rôle politique pour se concentrer sur ses recherches sur l'agriculture et l'hygiène.

Condition

Pliure
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Catalogue Note

76 lettres autographes signées de l’un des plus grands personnages de la révolution française, antoine barnave,qui débuta à l’extrême gauche des révolutionnaires constituants, fut l’un des créateurs du futur Club des Jacobins, fondateur de la Société des Amis des Noirs, mais dont l’histoire retient essentiellement les dérapages : sa déclaration choquante de désinvolture sur le « sang impur » des premières victimes de la Révolution à Paris, son refus de voter l’égalité des Noirs avec les Blancs, et enfin son empathie pour la famille royale  au retour de la fuite du roi à Varennes, et les efforts secrets qu’il déploya dès lors, comme Mirabeau avant lui, pour amener roi et pouvoir révolutionnaire à s’accorder pour une monarchie constitutionnelle. Ces deux prises de position constituèrent les principaux chefs d’accusation qui envoyèrent Barnave à l’échafaud le 29 novembre 1793.

cette passionnante correspondance recouvre les années de maturation politique de barnave. On y suit son parcours, typique des premiers acteurs de la Révolution : les années de jeunesse du jeune avocat (il n’a pas 22 ans dans la première lettre, datée du 29 novembre 1782), sa vie quotidienne à Saint-Robert (Isère), ses lectures, ses points de vue sur la crise économique et les mesures qu’il approuve à la veille de la Révolution, ses amitiés intellectuelles, son élection à Vizille dans les rangs du Tiers Etat, ses premiers pas de député du Dauphiné  à Versailles aux Etats-Généraux, et sa vie quotidienne à Paris... Il est plus que vraisemblable que lorsque Barnave est arrêté en août 1792, suite à la découverte d’une correspondance compromettante avec la famille royale, Rigaud de L’Isle décide, pour sa sécurité personnelle, de détruire les confidences proprement politiques que Barnave lui fit depuis 1790.

le style des lettres est très vivant, et l’on comprend pourquoi barnave fut sa vie durant, comparé a mirabeau l’orateur. Il savait plaider, convaincre, et tenir en haleine. On s’étonna souvent qu’il n’ait pas réussi à faire flancher le Tribunal Révolutionnaire, qui le condamne à mort en pleine Terreur le 28 novembre 1793. (voir les archives du Trib.)
On trouve, par ailleurs, dans Barnave un fin esprit bibliophile lorsqu’il recommande l’achat du Lavater à son ami : "en l’achetant à présent vous serez mieux servi pour l’épreuve des gravures et en l’achetant à la source ou dans quelques années il se trouverait épuisé, vous l’aurez non seulement brut et sans avoir été gâté comme le sont la plupart des livres par les reliures  communes qui gâtent sans remède les marges et ôtent presque tout le prix de ouvrages de ce genre" (25 septembre 1787). C’est précisément à cette date que débute l’intérêt de Barnave pour la politique. D’emblée il se situe dans l’opposition au pouvoir royal, contre l’édit sur les protestants, contre les assemblées provinciales, contre les lettres de cachet. Il raconte la Journée des Tuiles de Grenoble, l’émigration rampante de la noblesse et des grands financiers, l’ambiance explosive à Paris. Il assiste à l’assemblée provinciale de Vizille, où il représente Grenoble, le 21 juillet 1788. Nommé député du Tiers Etat avec Mounier,  Barnave se rend à Paris et de Versailles dès le mois de mai 1789, il décrit la tension qui règne dès les premiers jours des Etats-Généraux : "Nous sommes maintenant prorogés à lundi comme les deux autre ordres chacun dans leur chambre. Le clergé demande à concilier, la noblesse procède à vérifier ses pouvoirs, le tiers état attend dans une inaction imposante, les deux autres ordres dans la salle commune" (8 mai 1789).

Les lettres éclairent avec précision les débuts fulgurants de la carrière de Barnave, le rôle éminent de Mounier, et la rivalité qui perce avec Mirabeau : Je suis déjà aussi connu de l’assemblée que Mounier et Mirabeau, c’est à dire beaucoup plus que les autres, mais Mounier et moi sommes objets d’estime et Mirabeau de curiosité, tout cela tient pour mon compte à deux opinions motivés, mais je connais déjà assez l’assemblée pour être sûr que je serai parmi les 3 ou 4 à qui l’organe et la facilité de s’énoncer donneront le plus d’avantage. J’attends que la réputation vienne à moi et ne vais point à elle. J’ai absolument refusé de donner à Mirabeau pour son journal le résumé de ma première opinion (15 mai 1789). Elles offrent aussi un témoignage de toute première main sur les peurs ressenties par les acteurs de la scission au Jeu de Paume : "Le conseil a été très orageux pendant ces derniers jours, on a, dit-on, inutilement travaillé  à déterminer le roi à des partis violents, le projet était d’enlever parmi nous 6 à 7 personnes. Celles qu’on nomme dans le public sont l’abbé Sieyès, député de Paris, Le Chapelier député de Rennes, Bailly président, La Borde de Méréville député d’Etampes et votre ami" (21 juin 1789) ; "Il passe pour constant que le projet d’arrêter un nombre considérable de membres des 3 ordres a été plusieurs fois formé" (11 juillet 1789). La réputation sulfureuse de Barnave, qui perdure aujourd’hui, est essentiellement bâtie sur deux points saillants, dont le plus célèbre est l’invective terrible qu’il lança à l’Assemblée à certains députés outrés de la mort atroce des intendants Foulon et Berthier de Sauvigny : « Ce sang était-il donc si pur, qu'on n'osât le répandre ? ». Cette attitude est absolument contredite dans la version qu’il donne ici à Rigaut de L’Isle : « Le peuple de Paris a mis à mort ces jours passés M. Foulon et M. Berthier de Sauvigny intendant de Paris. Ces jugements sans forme de procès ont été exécutés avec des détails atroces. » (26 juillet 1789).  Barnave se radicalise rapidement. Tout en portant une attention soutenue aux intérêts de sa province (Grenoble, Crest, Vercheny sont très souvent mentionnés), il accède aux décisions à l’échelle nationale. Le 14 février 1790, il annonce : « Nous avons hier supprimé les ordres religieux de l’un et de l’autre sexe. Cette disposition générale a été et sera encore accompagnée de plusieurs mesures sur le sort des personnes actuellement engagées. »

La correspondance se termine à la date du 30 juin 1790, sur un vif reproche de Barnave contre l’attitude insolente de Mirabeau vis-à-vis des administrateurs de départements.

On joint à cet ensemble 22 lettres de Madame Barnave mère, toutes rédigées à Saint-Robert, s’échelonnant entre 1786 et 1800, dans lesquelles s’expriment fierté, craintes et méfiances durant la Révolution, puis, après la mort de son fils, ses préoccupations plus matérielles autour du bonheur de ses filles.