Lot 9
  • 9

François-Xavier Lalanne

Estimate
250,000 - 350,000 EUR
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Description

  • François-Xavier Lalanne
  • Sauterelle
  • signé et daté sur l'aile gauche
  • biscuit blanc de Sèvres, acier et laiton poli
  • 185 x 85 x 75 cm; 71 3/4 x 33 1/2 x 29 1/2 in.
  • Exécutée en 1970, cette oeuvre a été réalisée à 2 exemplaires.

Provenance

Paul Facchetti Gallery, Zurich
Collection particulière, Genève (acquis auprès du précédent en 1972)
Galerie Hopkins-Custot, Paris
Acquis auprès de celle-ci par le propriétaire actuel en 2005.

Exhibited

Paris, Galerie Alexandre Iolas, Les Tirages restreints de François-Xavier et Claude Lalanne, 1970
Paris, Galerie Hopkins-Custot, 9ème Pavillon des Antiquaires, Avril 2005

Literature

Alexandre Iolas, Les Lalannes, Paris, 1970
France Bertin, Un bestiaire pour l'environnement, Votre Maison, no. 135, août-septembre 1970,  illustré p. 48
Anonyme,  Pas en cage, Connaissance des Arts, no. 225, novembre 1970, illustré p. 130
John Russell, Les Lalannes, Paris, 1975, cité p. 66
Alan Hamilton, A Queen's ransom from accross the globe, The Times, 27 avril 2002, illustration du deuxième exemplaire p. 4M
Pauline Simons, Un Pavillon dans l'air du temps, Le Figaro Magazine, 2 avril 2005, illustré p. 98
Daniel Abadie, Lalanne(s), Paris, 2008, illustré p. 93

Condition

This work is in good condition. There are some surface dirt and a few dots of stains on the porcelain. There is some vert de gris on the steel parts (mostly visible on the front right leg as it can be seen in the catalogue illustration). There are some scuffs on the polished brass, especially where the wings touch the legs.
"In response to your inquiry, we are pleased to provide you with a general report of the condition of the property described above. Since we are not professional conservators or restorers, we urge you to consult with a restorer or conservator of your choice who will be better able to provide a detailed, professional report. Prospective buyers should inspect each lot to satisfy themselves as to condition and must understand that any statement made by Sotheby's is merely a subjective, qualified opinion. Prospective buyers should also refer to any Important Notices regarding this sale, which are printed in the Sale Catalogue.
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Catalogue Note

signed and dated on the left wing, white Sèvres porcelain, steel and polished brass. Executed in 1970.

Fig.1. Sauterelle vue de face
Fig. 2. Jean-François Leleu, Table de toilette, vers 1760-63, The Wallace collection, Londres. - © D.R.
Fig.3. Pablo Picasso, La chèvre, Musée Picasso. - © Succession Picasso 2009.
Fig. 4. Claude et François-Xavier Lalanne, vers 1969 © D.R.

Polymorphoses-6
Le Temps des Moissons

Nous voici le 15 juillet, la sauterelle est à l'ouvrage
et l'on entend grincer ses machines.
Mais celui qui verra les moissonneuses-batteuses sauter
d'un champ à l'autre pour se dégourdir les jambes aura
trop bien fêté le 14.

François-Xavier Lalanne, Polymorphoses, Paris, 1978

La Sauterelle, sculpture-bar de François-Xavier Lalanne présentée pour la première fois en janvier 1970, n'existe qu'en deux exemplaires : l'un est présenté aujourd'hui, le second se trouve dans les collections de la Reine Elisabeth II d'Angleterre et est actuellement conservé dans sa résidence privée à Balmoral en Ecosse. Ce dernier exemplaire, appartenant à la Manufacture de Sèvres, fut offert au Duc d'Edimbourg par le Président de la République Georges Pompidou lors de la visite officielle de la Reine en France.

Cette œuvre est un exemple de sculpture-meuble à transformation : une fois ouverte elle se transforme en bar, les ailes servant de support, le corps de compartiments à rangement. Elle se rattache au bestiaire de sculptures œuvres d'art fonctionnelles initiées par Lalanne dès 1964 avec le Rhinocrétaire. Suivent en 1966, les Moutons tabourets, la Mouche et les Autruches, première sculpture dans laquelle l'artiste emploie la porcelaine de Sèvres. A cette occasion, André Fermigier  écrit dans le Nouvel Observateur du 19 janvier 1966: « (Lalanne) nous offre aujourd'hui à la galerie Alexandre Iolas, quelques animaux somptueux, eux aussi transformés en objets de salon, corbeilles à linge, rafraîchissoirs et cavités de laiton à usages multiples. Une Chatte, dont les flancs se relèvent en ailes de bête d'Apocalypse, une Sauterelle et surtout un couple d'Autruches qui soutiennent de leurs becs retournés une tige de métal et dont les flancs se soulèvent de façon d'autant plus gracieuse qu'ils sont exécutés non plus en cuir ou en laiton mais en belle et fine et tendre porcelaine de la Manufacture nationale de Sèvres. »

Loin de l'interdiction de toucher des musées, Lalanne, par ses sculptures utilitaires, polymorphes, incite le spectateur à s'approcher, à toucher, à utiliser les œuvres, les désacralisant ainsi. L'art n'est plus séparé de la vie courante, mais en fait partie et cependant les œuvres ne sont pas réduites à des objets banals. Au contraire, elles sont travaillées avec des matériaux nobles comme le marbre ou la porcelaine et deviennent totalement uniques et luxueuses. La question a toujours été posée de savoir comment définir et classer ces œuvres. Dominique Desanti dans Planète (mars-avril 1970) soulève la problématique posée par l'œuvre des Lalanne : « Un objet d'art ? Un objet technique ? Un objet utilitaire ? Un objet inutile ? Les sociologues croyaient pouvoir diviser l'objet, le répartir entre ces quatre catégories logiques. Voilà que tout se mêle. Cette fluidité de l'objet, ce passage entre catégories, ce refus de classement semblent propre à notre époque. »

Non seulement les genres se mêlent mais la poésie et la magie font irruption dans notre quotidien au travers de ces œuvres. Une sauterelle devient ainsi plus grande que le plus grand des chiens, l'ordinaire s'élargissant aux dimensions du rêve tel qu'aurait pu le concevoir la petite Alice de Lewis Caroll. Dans son monde tout se transforme et rien n'est jamais ce qu'il semble être : on joue au croquet avec un hérisson et un flamand. Chez Lalanne, par une miraculeuse métamorphose, une mouette devient un lit à baldaquin. L'univers merveilleux d'Alice au Pays des Merveilles n'est pas la seule filiation que l'on a bien voulu trouver aux œuvres de l'artiste. Outre le mobilier à transformation français du XVIIIème et une certaine parenté avec le surréalisme de Magritte (explicitement cité dans le travail de Claude), l'œuvre de François-Xavier se rattache également à la tradition de la sculpture animalière telle qu'elle fut pratiquée en France de Barrye à Pompon. La sculpture égyptienne et assyrienne, contemplée pendant les six mois que François-Xavier passa comme gardien de salle au Louvre, ont indéniablement apporté leur hiératisme à certaines sculptures du bestiaire de l'artiste. Et cependant, si la question lui est posée, la création est pour lui toujours un jeu et l'œuvre d'art une chose accessible, poétique et liée à la vie quotidienne. A Marie-Claire Blanckaert qui lui demande pour Elle Décoration (décembre 1997) la raison de la présence constante d'animaux et de végétaux dans leurs œuvres, François-Xavier Lalanne répond : « Les animaux et les végétaux ont ceci d'attachant qu'ils sont totalement indifférents aux œuvres d'art. Un liseron grimpe avec autant de détermination contre un poteau en ciment qu'il s'épanouit sur une Vénus callipyge. Quant aux animaux, ils affichent la même insouciance qu'avait il n'y a pas si longtemps le petit peuple d'Italie à squatter joyeusement les grands monuments abandonnés. »

'Voici la fine sauterelle,
La nourriture de Saint Jean.
Puissent mes vers être comme elle,
Le régal des meilleurs gens.'
Ainsi chantait Apollinaire dans le Cortège d'Orphée.
On dit qu'il y a, maintenant moins de sauterelles. Il est vrai aussi que, de nos jours, nous avons moins de saint Jean
.
François-Xavier Lalanne, Bestiaire Ordinaire, Paris, 2003