Lot 132
  • 132

Magnifique tête, Fang, Gabon

Estimate
400,000 - 500,000 EUR
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Description

  • Fang
  • Magnifique tête
  • haut. : 37,5 cm
  • 14 3/4 in
Superbement mise en valeur par le cou étiré, la tête d'ancêtre nlo-byeri s'impose, majestueuse. Avec une sensibilité extrême, le jeu de courbes tendues conduit le regard depuis la ligne bombée du front se fondant dans le creux du visage, jusqu'au retour de la bouche tendue - stylisée selon la moue caractéristique de la statuaire fang -, tandis que de petites oreilles arrondies mettent en valeur les tempes rasées. L'intensité de l'expression est rendue par les pupilles de laiton. A la fluidité des lignes du visage répond le traitement de la coiffure, à trois tresses finement gravées en chevrons, partant du sommet du front pour retomber en oblique sur la nuque. Au sommet de la tête, un orifice transverse permettait de fixer des plumes qui ornaient souvent les figures du byeri. Le long cou cylindrique est prolongé par un tenon plus mince qui servait à maintenir la sculpture enfoncée dans son coffre-reliquaire en écorce, nsekh-byeri. Superbe patine noire, suintante.  



Le cou montre, à l'arrière, les traces d'une ancienne étiquette, et le numéro d'inventaire Ratton/Carré peint à l'encre blanche : 1098. Le socle, signé Inagaki, porte la trace du cachet en plomb des douanes françaises, une étiquette marquée  n° C.A. 1612, et une autre,  "n°49".

Provenance

Charles Ratton et Louis Carré, Paris, (lot Marion), 18 mars 1932-1935
Collection Louis Carré, Paris, 1935-1977 (en dépôt à New York aux M. Knoedler & Co Galleries, au cours des années 1940)
Collection Olga Carré, 1977-2002

Literature

Exposée et mentionnée dans :
Sweeney, African Negro Art, 1935 : 47, n°374, catalogue de l'exposition, The Museum of Modern Art, New York, 19 mars – 19 mai 1935 

Exposée et reproduite dans :
Locke et Al, An exhibition of African Art, 1946 : 25-26, n°126, catalogue de l'exposition, Baltimore Museum of Art, Baltimore, 1er - 24 novembre 1946

Figure sur le cliché de Soishi Sunami montrant l'accumulation des œuvres avant leur installation au MoMA, au moment de leur vérification à la douane de New York.

Catalogue Note

La tête « Louis Carré » est à coup sûr un des chefs-d'œuvre de l'art sculptural fang que tout collectionneur d'art africain rêve de posséder un jour : une œuvre exceptionnelle, archétype des têtes à coiffe tressée du nord du Gabon avec son visage à la face creuse, sa bouche projetée vers l'avant et sa chevelure à nattes délicatement gravée, une patine noire et suintante comme il se doit et accompagnée d'un dossier de provenance quasi historique remontant aux années 1930, la grande époque des arts nègres. Plusieurs étiquettes et marques situées sur le socle et la partie arrière du cou rappellent l'histoire de ce chef-d'œuvre depuis les années 30. On comprend que Louis Carré, après avoir acquis cette merveille à demi avec Charles Ratton en 1932, l'ait par la suite rachetée – probablement en 1935 - puis jalousement conservée pour lui et les siens sa vie durant jusqu'à sa disparition en 1977.

Si elle a été exposée à New York en 1935 (African Negro Art, The Museum of Modern Art, n° 374) puis à Baltimore en 1946 (An exhibition of African Art, The Baltimore of Art, n° 126), elle n'a jamais été publiée depuis, rendant plus important encore l'impact de sa redécouverte.

Datant du XIXe siècle au moins, cette tête a été pendant des décennies imprégnée d'un onguent à base d'huile de palme au cours des rites propitiatoires que ses propriétaires lignagers lui ont très régulièrement assurés, de génération en génération. Evocation d'un ou une ancêtre dans la plupart des groupes « pahouins » du Gabon et du Rio Muni, ce type de représentation coexistait avec des bustes et des statuettes en pied, tout au moins au début du XXe siècle comme G. Tessmann a pu le constater au Rio Muni en 1907 (cf. « Die Pangwe », 1913, vol. 2, p. 118, ill. 43). Certains spécialistes cependant ont émis l'hypothèse que chez les Ntumu et les Betsi notamment les têtes seules auraient précédé l'utilisation des statues entières, la sculpture évoquant plus directement les crânes qui étaient, en fait, les éléments sacrés du culte.

Parmi les têtes fang connues, dont une magnifique série fut montrée l'an passé au Metropolitan Museum of Art de New-York (cf. « Eternal Ancestors, The Art of the Central African Reliquary », ed. by A. LaGamma, 2007, pp. 190-209), la tête "Louis Carré", restée pendant plus de quarante ans à l'écart des expositions et autres publications spécialisées, s'impose maintenant au regard par sa remarquable qualité sculpturale, comme un des chefs-d'œuvre majeurs de l'art fang.

Louis Perrois, Septembre 2008

A magnificent Fang head, Gabon

Undoubtedly one of the masterpieces of Fang sculpture, the 'Louis Carré' head is an object which any collector of African art would dream of owning: an exceptional work, it is the archetype of the heads with plaited hair from the north of Gabon, with its hollow face, mouth projecting outwards, finely carved plaits of hair and a black and sweating patina. The head is also accompanied by a quasi-historical dossier of provenance dating back to the 1930s, the great era for 'arts nègres'. Several labels and marks on the base and the back of the neck point out the history of this masterpiece since then. One understands that Louis Carré, after having acquired a half-share in this wonderful object with Charles Ratton in 1932, then bought it for himself, probably in 1935, jealously guarded it thereafter for the rest of his life until the figure's disappearance in 1977.

It is astonishing to note that whilst the head was exhibited in New York in 1935 (African Negro Art, no. 374 The Museum of Modern Art) and then in Baltimore in 1946 (An Exhibition of African Art, no. 126, Baltimore Museum of Art), it has not been published or exhibited since, which makes the impact of its rediscovery all the more important.

Dating from the 19th century at least, over several decades the offered head was impregnated with a palm-oil based ointment during the regular propitiatory rites which its owners carried out from generation to generation. Heads, which were made to commemorate ancestors in the majority of the 'Pahouin' groups of Gabon and Rio Muni, coexisted with busts and standing figures from at least the beginning of the 20th century, as G. Tessmann saw them in Rio Muni in 1907 (see Die Pangwe, 1913, vol. 2, p. 118, it. 43). Certain specialists however have suggested that at Ntumu and Betsi in particular that the use of heads would have preceded that of whole figures, the sculpture of the former being more directly evocative the skulls which were, in fact, the group's sacred objects.

Amongst the known Fang heads, including a splendid series which was shown last year at the Metropolitan Museum of Art in New York (see Eternal Ancestors, The Art of the Central African Reliquary, A. LaGamma (ed.), 2007, pp. 190-209), the 'Louis Carré' head has for more than forty years remained unseen in exhibitions and specialised publications. Its remarkable sculptural quality now imposes upon one's eye its position as one of the greatest masterpieces of Fang sculpture.

Louis Perrois, September 2008